2007 09, Dominique Desjeux, création d’un doctorat professionnel en sciences sociales

2007, 6 septembre : Présentation de la formation doctorale professionnelle en sciences sociales à la Sorbonne, Université Paris Descartes

PhD professionnel de Responsable d’études
Début de la formation : 16 novembre 2007
Cliquez pour télécharger

Contact : d.desjeux@argonautes.fr

Mise en ligne le 6 septembre 2007

Archives

 

 

2007, janvier, Dominique Desjeux

Pourquoi créer des doctorats professionnels

Conférence à l’ASES de janvier 2007.

Dominique Desjeux, anthropologue et sociologue

Professeur à la Sorbonne, Paris-René Descartes

Professeur invité à USF (USA) et à l’université Guangwai à Guangzhou (Chine)

Consultant international, EURLDaize and co
d.desjeux@argonautes.fr

 

1 – Quelques déclencheurs de l’idée de lancer une formation professionnelle de niveau doctorale

 

Je vais essayer d’exposer en termes simples et personnels pourquoi je suis en train de lancer un doctorat professionnel à la Sorbonne dans le cadre de l’école doctorale de l’université Paris-René Descartes et qui débutera en 2007-2008.

En 1995, j’étais au congrès des anthropologues américains à Atlanta qui montrait que 50% des PhD (docteurs) en anthropologie travaillaient en dehors de l’université. J’en ai tiré la conclusion qu’il fallait préparer les futurs docteurs à travailler en dehors de l’université.

En 2005, il y avait autour de 450 docteurs habilités en sociologie par le CNU en France pour une quarantaine de place dans le supérieur. Ce que j’avais vu à Atlanta se confirmait. De plus en plus de docteurs en SHS devront travailler hors de l’université.

En 2006, il y  avait autour de 500 inscrits en thèse à l’école doctorale des SHS Sorbonne (Paris-René Descartes) pour 200 thèses soutenues. Je me suis demandé comment trouver des débouchés pour tous ces inscrits ou docteurs. Pourquoi ne pas leur fournir une formation complémentaire professionnalisante mais qui ne soit pas orientée vers les concours administratifs ce qui est fait par ailleurs au niveau L et D et surtout parce que la tendance actuelle depuis 20 ans dans le monde, en Chine, au Canada, en Allemagne, en Grande Bretagne est de diminuer le nombre des fonctionnaires afin de mieux les rémunérer et de les rendre plus efficaces.

Il faut donc penser à former des sociologues qui puissent travailler en entreprise ou en profession libérale (en plus de ceux qui vont passer des concours administratifs ou travailler auprès des collectivités locales mais dont les débouchés seront saturés à terme).

Enfin il faut former des sociologues/anthropologues pour le secteur privé, entreprises ou ONG, qui sachent se débrouiller sur un marché professionnel ouvert. C’est ce que j’ai appris chez Crozier entre 1969 et 1971 et que je mets en pratique au Magistère de sciences sociales de la Sorbonne depuis 1989.

 

2 – Comment mon expérience professionnelle m’a servi

 

Dans ma carrière j’ai été deux fois au chômage, dont une fois deux ans en rentrant d’Afrique, et une fois licencié durant un conflit du travail puis de nouveau au chômage deux mois.

J’ai donc appris à travailler en libéral et à créer une entreprise, à démarcher des clients, à faire des budgets avec TVA, à répondre à des demandes d’entreprise dans les domaines de la consommation, des innovations et des décisions en entreprise, dans les administrations ou des associations caritatives, dans l’interculturel en Europe, aux USA, en Afrique et en Chine, et maintenant au Brésil.

J’en ai tiré une conclusion : le métier de sociologue est d’abord un métier d’enquête de terrain que ce soit pour faire des études ou pour faire des recherches. C’est aussi un métier collectif.

Pour moi, le sociologue n’a pas d’abord une fonction critique. Il a une fonction plus modeste mais fondamentale aujourd’hui : il a à dire le vrai, ce qui est, comment cela fonctionne, quels sont les intérêts en présence et si possible augmenter les capacités à coopérer, à résoudre les problèmes et à accompagner les changements de façon objectivée. Si le sociologue ne fait pas d’enquête neutre qui tiendra ce rôle aujourd’hui ? Si le sociologue n’est pas rigoureux en méthode de recueil et d’analyse de l’information qui le fera aujourd’hui ?

 

3 – Quelles sont les compétences demandées pour exercer le métier de sociologue

 

Le métier de sociologue demande de savoir gérer de la logistique, des techniques d’enquêtes, des équipes de chercheurs et de chargés d’études, des planning dans un temps court (3 semaines à 4 mois), de réaliser des modélisations interprétatives qui permette de lire la réalité en terme d’enjeu, de contrainte et de sens, de traduire des résultats d’enquête en pratique opérationnelles pour les acteurs, que ce soit par rapport aux SDF, aux surendettés, aux services marketing, aux DRH ou aux laboratoires pharmaceutiques, et donc in fine de supporter de ne pas correspondre à la norme académique, d’étudier les phénomènes sociaux suivant une approche neutre et compréhensive sans jugement moral.

Il demande aussi de prendre en compte les clivages sociaux (classes, générations, genres/homo/hétéro, culturels) et pas uniquement les pauvres ou les plus démunis, de diversifier les échelles d’observation ce qui permet de comprendre autant les effets d’individu, que les effets de groupe, d’institution que d’appartenance sociale, dans des pays divers et autant en milieu rural qu’en milieu urbain.

Il faut passer par l’apprentissage des langues : en 1994, j’ai passé 4 mois et demi aux USA pour apprendre l’anglais; depuis 2006, j’investis dans l’apprentissage de la langue chinoise car je vais en Chine depuis 1997 faire des enquêtes.

Il faut sans cesse apprendre et comprendre les usages sociaux des NTIC et réfléchir aux nouvelles formes de e-learning (formations par Internet, pour faire vite).

 

4 – Le projet actuel de traduction du métier en formation diplômante

Le conseil d’administration de Paris-René Descartes, avec l’aide de Monique Hirschhorn, Vice présidente, suite au soutien du Président Hainaut et de Bernard Valade directeur de l’école doctorale, a accepté le lancement d’une formation professionnelle de niveau doctoral en novembre 2007.

Cette formation comprend trois diplômes d’université avec un DU niveau 1 (bac plus 6) pour former des chargés d’études consommateurs en France et à l’international ; un DU niveau 2  (bac plus 7) pour former des responsables du management et de la diversité nationale et internationale ; un DU niveau 3 (bac plus 8) pour former des directeurs d’études qui auront un diplôme de type « PhD professionnel » en sciences humaines et sociales.

Ces diplômés pourront devenir des directeurs d’études qui sauront à la fois faire des enquêtes et manager des équipes et le tout fonder sur une forte capacité de réflexion intellectuelle liée à la thèse.

La formation pourra être couplée avec une thèse CIFRE ou une inscription en thèse classique. La thèse pourra être constituée par la mise en perspective des enquêtes menées en DU 1 et DU 2. Elle devrait faire 200 à 300 pages maximum et pourvoir être éditée en ligne. Elle pourra aussi être couplée avec des stages et des emplois de salarié.

L’objectif est donc d’avoir une double formation professionnelle et académique à Paris-Descartes,  une forte dimension internationale, une bonne adaptation aux demandes des entreprises et du marché.

L’avantage de cette formation est qu’il sera possible de s’arrêter après le DU 1 ou le DU 2 qui ont leur autonomie propre et donc de ne plus être dans une pratique du tout ou rien comme avec la thèse classique où si on ne finit pas sa thèse on sort de l’université sans rien. La VAE (validation des acquis de l’expérience) pourra être mobilisée.

Les frais de scolarité sont de 2500€ par an en formation initiale ou de 5 000€ par an en formation continue.

 

5 – Programme provisoire des trois DU

 

DU niveau 1 : « Chargé d’études consommateurs en France et à l’international »

Ethnomarketing : théorie et méthodologie de la réflexion sur la consommation et la segmentation ethnique des marchés en fonction des réalités multiculturelles des sociétés contemporaines. Analyser les marchés ethniques et culturels : méthodes d’enquête.

Economie et sociologie politique mondiale centrée sur les BRICs (Brésil, Russie, Inde, Chine) : réalités et conséquences des processus de mondialisation au plan économique et politique.

Connaissance de l’Europe (histoire, institutions, économie, culture) : histoire et sociologie du processus de construction ; analyse des fonctionnements institutionnels et de l’élargissement ; approches économiques et industrielles.

Les approches de l’interculturel : anthropologie, histoire, géographie des civilisations et cultures ; processus de communication ; micro-sociologie et psychologie-sociale interculturelle.

Usage de l’ordinateur appliqué aux études : powerpoint, présentation de résultats, recherche d’information, mise en page de documents visuels.

Cours de langues (introduction ou amélioration) : anglais et/ou chinois.

Réalisation d’une enquête en rapport avec la consommation, suivi par un tuteur, soit de manière individuelle, soit collective, et pouvant être proposée par une entreprise. L’approche méthodologique est comparative, elle peut être qualitative ou  quantitative ; il s’agit de s’appuyer sur des fondements sociologiques, anthropologiques ou des méthodologies de sciences sociales assurées.

Réalisation d’un mémoire de recherche applicable qui pourra servir de première base à une thèse classique.

 

DU niveau 2 : «Management d’équipe nationale et internationale » ( Chef de projet en conduite du changement et de la diversité nationale et internationale)

Théorie des organisations, sociologie de l’innovation et de la décision approfondissement de la sociologie des réseaux : théorie générale ; capital social et réseaux sociaux.

Le management interculturel

Commerce international (macro et micro-économie) et transformation du système de production : la géographie des échanges et des implantations internationales ; les théories du commerce international ; les mutations des formes productives et des politiques publiques

Le management de la connaissance : knowledge management ; organisation apprenante ; société apprenante

Les principaux courants des sciences de gestion : management  d’entreprise, analyse stratégique

Droit, gestion financière et fiscale, administration des entreprises et des institutions

Gestion de projet et pilotage de l’innovation/R&D, théorie de l’organisation des firmes (matricielles/…)

La gestion des compétences et les ressources humaines : théorie du capital humain, droit social, droit et ingénierie de la formation.

Animation et exercices de groupe destinés au passage à l’action : former des « managers entrepreneurs » (Société Pragmaty).

Gérer la diversité : exercices d’animation de groupe

La responsabilité des organisations, responsabilité sociale, éthique, développement durable, traçabilité des NTIC, CNIL.

Réalisation d’un mémoire de recherche applicable qui pourra servir de deuxième base à la thèse classique

 

DU niveau 3 : « Diplôme doctoral professionnel  en sciences sociales » (Directeur d’études national et international, ‘PhD en sciences humaines et sociales’ )

 

Connaissance de l’Europe et des BRICs : focalisation sur un ou deux pays stratégiques.

Les grandes questions de l’actualité internationale et géopolitique.

Le commerce international : études de cas

La théorie du projet : individu (psychologie sociale) ; groupe (sciences de gestion et sociologie)

Le management interculturel, imaginaires et analyse stratégique appliqués au processus d’innovation dans les organisations, le marché et les consommateurs

Les méthodologies d’études et d’enquêtes spécifiques : consommation, changement…

Conduite de projet : évaluation initiale des compétences, suivis de lectures, exposés, présentation, résumés sur la littérature et les théories sur les champs de l’étude et de la gestion/direction de projet.

Animation et exercices de groupe destinés au passage à l’action.

Méthodes de prospection, vente et gestion de contrats d’interventions.

Témoignages sur les débouchés professionnels.

Atelier d’écriture et de valorisation de la thèse par des articles : apprentissages spécifiques à la communication écrite et orale, notamment orientée vers la rédaction de synthèses lisibles et d’une thèse de doctorat publiable, d’un volume de l’ordre de 120 pages (200 000 signes)

Rédaction d’une thèse à partir des recherches des DU 1, 2 et 3 conduisant à une modélisation théoriques et à des préconisations inductives qui partent des enquêtes et des méthodes de management projet.

 

Les étudiants qui auront réussis à ces trois DU auront droit à un diplôme de formation professionnelle de niveau doctorale sous le sceau de Paris-René Descartes et ceux qui seront en CIFRE ou inscrit en thèse classique auront en plus le diplôme classique.

 

Conclusion : objectif d’une formation doctorale professionnelle

 

Partir d’un métier pour remonter aux savoir faire puis à la discipline et aux auteurs.

Apprendre à traduire une question d’entreprise en une question de connaissance puis à traduire une connaissance empirique en action pratique.

Apprendre à jongler entre des temps, des budgets, de la logistique et des modèles intellectuels.

Prendre du plaisir à comprendre la vie ordinaire et à rechercher le vrai.

L’objectif de fond est de former des entrepreneurs responsables qu’ils travaillent en entreprise, en ONG ou en free lance et qui soient capables de créer de la richesse base de  toute redistribution et d’équité nationale et internationale.

 

Dominique Desjeux

consommations-et-societes.fr : site consommations et sociétés

Facebook
LinkedIn
Twitter
Email