1992, D. Desjeux, S. Taponier et alii, Analyse stratégique de la communication de l’université Paris 5

Consommation

 

PRE-ENQUETE

 

ETUDE DE LA COMMUNICATION INTERNE

A L’UNIVERSITE RENE DESCARTES

 

ANALYSE

Direction scientifique :

Dominique DESJEUX, Professeur d’anthropologie sociale et culturelle à l’Université René Descartes, Directeur scientifique d’Argonautes

Enquête réalisée par :

Sophie TAPONIER, Chercheur au Laboratoire d’Ethnologie de l’Université René Descartes, Directeur de la recherche et des études d’Argonautes

Sophie ALAMI, Sociologue, Chercheur à Argonautes

Dominique DESJEUX

MARS 1992

consommations-et-societes.fr

Nous remercions tous les membres de l’Université René Descartes, les personnels Atos-Ita, les responsables et directeurs d’UFR et les membres du Siège d’avoir bien voulu collaborer à cette étude.

 

SOMMAIRE

 

INTRODUCTION                                                                       p.5

 

CHAPITRE I. LES RELATIONS ENTRE LE SIEGE

ET LES UFR                                                                             p.9

 

    I. LES OPINIONS DES UFR SUR LE SIEGE                      p.10

A.Une coupure entre le Siège et les UFR : le Siège

méconnait les réalités et les problèmes du « terrain »                p.11

B. Un fonctionnement du Siège formaliste et un

cloisonnement hiérarchique                                                  p.15

 

II. LA CIRCULATION DE L’INFORMATION

    ENTRE LES UFR ET LE SIEGE                                          p.17

A. La lenteur des délais de transmission                                   p.17

B. Des délais de réponse trop courts exigés par le Siège           p.21

C. Des documents inutiles ou peu compréhensibles                  p.22

D. Des problèmes matériels de circulation de l’information        p.23

 

 

CHAPITRE II. LES RELATIONS ENTRE LES UFR ET CERTAINES DIVISIONS DU SIEGE : LA DSI, LA DIF ET LA DIP                           p.25

 

 

    I. LES RELATIONS ENTRE LES UFR ET

       LA DIVISION DE LA SCOLARITE

       ET DE L’INFORMATIQUE                                                p.26

A. Le dossier scolarité : quelques difficultés qui ne

suscitent pas de réel mécontentement                                  p.27

B. L’informatique : pourquoi faire simple quand on

peut faire compliqué                                                            p.30

 

    II. LES RELATIONS ENTRE LES UFR ET

    LA DIVISION FINANCIERE                                                 p.33

         A. Des relations de travail qui posent problème                        p.33

B. Des dysfonctionnements qui génèrent des

comportements variés                                                         p.38

 

    III. LES RELATIONS ENTRE LES U.F.R.

          ET LA DIVISION DU PERSONNEL                               p.40

A. Les opinions sur ces relations                                             p.40

B. La circulation de l’information destinée

aux personnels Atos-Ita                                                       p.51

C. Les flux d’information                                                         p.57

 

 

CHAPITRE III : PROCESSUS DE DECISION ET SOURCES D’INFORMATIONS STRATEGIQUES                                                                     p.81

 

    I. LES REUNIONS, DES LIEUX

       STRATEGIQUES D’INFORMATION                               p.83

A. Les réunions, une source d’information                                p.83

B. Les réunions, des lieux d’apprentissage des

relations de pouvoir et d’élaboration des

jeux stratégiques des acteurs                                                p.86

 

    II. UN PROCESSUS DE PRISE DE DECISION

        INEGAL                                                                               p.91

A. Les réunions, des « chambres d’enregistrement » ?                 p.91

B. Un processus de décision parallèle au

système institutionnel                                                          p.93

 

 

CHAPITRE IV : LES ENJEUX EN TERME D’IMAGE COMMUNE         p.96

 

    I. LA PERCEPTION DES ATOS-ITA

       RELATIVE A L’UNIVERSITE                                            p.97

A. L’image de l’Université René Descartes                                p.98

B. L’image du Siège                                                                p.100

C. L’image de l’unité de travail de chaque participant                 p.101

 

    II. L’UNIVERSITE, UNE ENTITE PATCHWORK              p.104

A. Une entité très cloisonnée                                                       p.104

B. Le choix d’une appellation, un choix qui n’est pas neutre      p.109

 

 

CHAPITRE V. LES SOUHAITS EN MATIERE DE COMMUNICATION p.116

 

    I. LA COMMUNICATION INTERNE                                   p.117

A. Améliorer la circulation de l’information                           p.119

B. Organiser davantage de réunions pour résoudre

les problèmes concrets de vive voix                                p.120

C. Favoriser la rencontre des personnes                               p.120

D. Faciliter le repérage des interlocuteurs                              p.121

E. Créer des supports de communication interne                  p.121

F. Réorganiser l’affectation du personnel et créer

des postes « spécialisés »                                                  p.122

G. Revoir la structure de l’Université René Descartes

à partir de l’organisation pédagogique                               p.123

 

    II. LA COMMUNICATION EXTERNE                                p.125

A. Le développement de relations et d’accords

internationaux                                                                      p.125

B. La promotion de l’Université à l’extérieur                              p.128

C. L’amélioration de la communication avec les étudiants          p.129

 

 

INTRODUCTION

 

L’objectif de cette pré-enquête sur la communication interne de l’Université René Descartes est double :

– comprendre les formes de circulation de l’information au sein de l’Université René Descartes, entre le Siège et les UFR, en centrant l’analyse sur l’information relative à la carrière des personnels ;

– analyser les enjeux autour de la construction d’une image commune, et repérer les souhaits en terme de réflexion et d’action potentielle.

 

Trois constats peuvent être tirés de l’ensemble de la pré-enquête :

– une volonté d’innovation et de changement au niveau de la Présidence, au sens large (Présidence, Secrétariat général et Finance) ;

– le constat commun, Siège et UFR, de l’existence de nombreux dysfonctionnements, notamment en termes de lenteurs et de blocages ;

– une image très négative de la part des UFR vis à vis du Siège.

 

La volonté d’innovation de la Présidence se traduit notamment par :

 

– la mise en place de nouvelles règles du jeu dans la discussion du budget. Ces nouvelles règles sont imposées à la fois par le changement du système de dotation financière ministériel et par la volonté de donner au Conseil d’Administration un rôle de réflexion sur les orientations de l’Université plus que de gestionnaire du quotidien ;

 

– la réflexion sur les conditions d’une nouvelle pratique de communication en interne et en externe ;

 

– le renouvellement de la gestion financière autant en terme de simplification que de gestion des placements ;

 

– l’élaboration des contrats d’établissement demandés par le Ministère ;

 

– la mise en œuvre de commissions de réflexion sur les problèmes du personnel, notamment pour réaliser une politique plus systématique de formation continue :

« Aujourd’hui, il y a un vrai budget, de 400 000 F par l’Université, 150 000 F par le Ministère, 100 000 F par le Siège et de 50% dans certains cas par les UFR ou les laboratoires » (resp. adm. Siège).

 

Il y a donc un écart important entre la volonté politique affichée, la réalité de certains changements et l’image globalement négative que les UFR ont du Siège.

 

Nous pouvons donc faire trois remarques :

 

* cette image ne préjuge pas de la réalité de ce qui est reproché même si l’observation des pratiques confirme en grande partie les critiques émises.

 

* cependant, il faudrait pouvoir mieux distinguer l’opinion négative qui serait de l’ordre d’une réalité plus objective et l’autre qui serait d’un ordre plus stratégique. Dans le second cas, les UFR adoptent une  « stratégie du brouillard » qui consiste à dramatiser les aspects négatifs de leurs réalités quotidiennes, ceci dans le but défensif de préserver leurs acquis.

 

* Cet écart semble se retrouver entre chaque niveau hiérarchique dans la filière de l’Education Nationale : le Siège semble reproduire à l’égard du Ministère le même type de discours que les UFR à l’égard du Siège.

 

La pré-enquête dont nous présentons les résultats est fondée sur une analyse sociologique qualitative. Nous avons utilisé deux méthodes de recueil de l’information :

– des entretiens semi-directifs, menés auprès de 20 personnes, au Siège et dans les UFR, aux niveaux hiérarchiques de direction, chefs de service ou responsables administratifs ;

– une réunion de groupe de 10 personnes, représentant la diversité des catégories de personnels Atos-Ita du Siège et des UFR.

 

Les informations que nous exposons sont donc tirées de plusieurs sources et recoupées. Néanmoins, deux limites sont à rappeler :

– le statut de pré-enquête, vu sa faible ampleur par rapport à la réalité à étudier, ne permet pas de tirer de conclusions définitives ;

– une vision en partie « de l’extérieur » permet une prise de recul dans l’analyse des pratiques et des relations, et favorise le repérage des enjeux. Mais elle ne permet pas toujours la compréhension parfaite des détails techniques.

 

Notre rapport est structuré en cinq chapitres.

Le premier est consacré aux relations entre le Siège et les UFR, d’une manière globale.

Le deuxième analyse plus en détail les relations avec les divisions de la scolarité, financière et du personnel.

Le troisième chapitre tente d’interpréter les processus de décision, à partir des données analysées.

Le quatrième chapitre est consacré aux enjeux en terme d’image commune.

Enfin le cinquième chapitre porte sur les souhaits en terme de communication interne et externe.

 

CHAPITRE I

 

 

 

LES RELATIONS

 

 ENTRE LE SIEGE ET LES UFR

 

 

I. LES OPINIONS DES UFR SUR LE  SIEGE

 

Le constat d’une mauvaise communication entre le Siège et les UFR est unanime, et les services centraux sont conscients du problème :

« On sait bien que ça communique mal entre le siège et les UFR On a toujours de mauvais échos (…). C’est pareil avec le Ministère, mais là on ne peut pas agir ; donc on regarde ce qu’on peut améliorer au niveau de l’Université, où sont les plus gros dysfonctionnements » (resp. adm. Siège).

Les responsables dans les UFR ont effectivement des opinions globalement négatives sur le Siège et ses différents services.

Les unités ont d’une façon générale davantage à dire sur le Siège que l’inverse, car ce dernier représente une contrainte forte dans leur fonctionnement. Ce phénomène peut laisser l’impression que les critiques sont à sens unique, ce qui est inexact. Il est nécessaire de rappeler que notre analyse n’a pas pour objectif de juger, mais bien de montrer comment, concrètement, l’organisation « Université René Descartes » forme système. Dans cet esprit, nous pouvons simplement constater que chacun des « partis », Siège et UFR, se renvoient le plus souvent les responsabilités des dysfonctionnements.

Nous pouvons articuler l’analyse des mécontentements autour de deux  reproches majeurs : coupure avec le terrain et méconnaissance des personnes d’une part, formalisme, rigidité des procédures et cloisonnement hiérarchique d’autre part.

 

A. UNE COUPURE ENTRE LE SIEGE ET LES UFR : LE SIEGE MECONNAIT LES REALITES ET LES PROBLEMES DU « TERRAIN »

 

Sur ce thème, le reproche récurrent qu’adressent les UFR au Siège concerne son immobilisme, le fait que personne ne se déplace jamais.

Ce phénomène a deux principales conséquences négatives selon les responsables des UFR, qui portent d’une part sur la reconnaissance du personnel et d’autre part sur la connaissance des problèmes concrets du terrain.

 

1.  Une ignorance  de la réalité « physique » des unités

 

Le faible flux des relations et la faible fréquence des visites de la hiérarchie sur le terrain semblent à la source d’un manque d’expression « affective » de soutien ou d’encouragement aux personnels des unités, qui lui-même engendre un sentiment de non reconnaissance du travail accompli.

« Il faudrait qu’ils se déplacent d’abord du Siège ! Ici, dans l’UFR, on ne voit jamais un chef de division » (resp. adm. UFR).

« Les gens du Siège ne font jamais un petit tour auprès des personnels. Le personnel ne connaît pas leur tête » (resp. adm. UFR).

« Les gens ne se connaissent pas, que du papier et du téléphone. On ne connait pas les gens de l’Université avec qui on est censé travailler » (resp. adm. UFR).

« Le Siège ne va pas en périphérie, et ignore même physiquement la localisation et les personnels des périphéries. Nous, on sait comment ça se passe au centre, mais les gens de l’administration ne connaissent pas nos facs sur le plan humain » (dir. UFR).

« On a le sentiment d’être délaissé par le Siège »  (resp. adm. UFR).

« Le courrier va parfois dans un autre lieu, et n’arrive pas ici. Ils confondent, ils n’arrivent pas à nous identifier, et on finit par se demander : ‘est-ce qu’on existe vraiment ?' » (dir. UFR).

 

Les responsables des UFR souhaiteraient que les personnels se connaissent, aient l’occasion de se rencontrer. La levée de l’anonymat faciliterait la circulation de l’information, les relations de travail et la résolution des problèmes.

D’ailleurs, les opinions des personnels Atos-Ita à l’évocation de leurs relations avec le Siège portent en majorité sur la difficulté d’entrer en contact avec le bon interlocuteur :

« On n’a jamais la bonne personne. Il faut téléphoner plusieurs fois, il faut être patient au téléphone » (agent).

« L’accueil, c’est une catastrophe, il n’y en a pas » (agent).

« Au labo, on n’a pas d’annuaire. Ca manque surtout pour le Siège, car là, ça change. Donc on passe de poste en poste. On ne peut pas pointer quelqu’un de particulier » (agent).

« Pour des problèmes de personnels, de maladie, de compta, d’accidents du travail, pour tout. Que faire ? Qui joindre ? On ne sait jamais, c’est une perte de temps et d’énergie » (agent).

 

Les UFR mentionnent cependant deux initiatives qu’elles apprécient pour les occasions de relations personnalisées qu’elles créent : la séance de vœux du Président (bien qu’elle ne regroupe pas en même temps l’ensemble du personnel de l’Université), et le fait que les réunions des responsables administratifs ne se déroulent pas systématiquement au Siège mais « tournent » dans les UFR

Par ailleurs, les responsables du Siège qui se sont déplacés dans les UFR sont bien repérés par les personnes interviewées, qui, en soulignant l’évènement, expriment l’importance qu’elles y attachent.

 

2. Une méconnaissance des réalités de fonctionnement des UFR et une représentation erronée des unités

 

L’opinion selon laquelle « le Siège méconnait le terrain » est très répandue parmi les responsables des unités. Le Siège a un fonctionnement formel qui est inadapté à la résolution des problèmes sur le terrain, qui sont toujours des cas particuliers nécessitant de prendre en compte des « contraintes propres ».

« Le problème de l’administration centrale, c’est qu’ils sont coupés du terrain car ils ne sont en contact ni avec les enseignants, ni avec les étudiants, qui ne vont pas là-bas. Ils travaillent sur dossiers, et nous avec les gens. Donc nous, on s’adapte aux problèmes » (resp. adm. UFR).

« Il y a une cristallisation sur le formel. Ils font un travail de technocrates, et loin des réalités du terrain » (res. adm. UFR).

« Quand il y a un problème avec du personnel de laboratoire, qui a par exemple des horaires imprévisibles liés à une expérimentation, les gens du Siège ne comprennent pas. Ils n’ont aucun sens de la réalité locale. Ils manquent de connaissance concrète » (resp. adm. UFR).

 

Cette méconnaissance s’accompagne d’un refus de prendre en charge la « gestion » des individus qui expriment leurs problèmes concrets :

« Ils (les personnels du Siège) ne sont pas à l’écoute des personnels de la fac, qui ont des difficultés à montrer leurs difficultés » (dir. UFR).

« Le Siège ne reçoit pas, surtout pour les problèmes concrets » (resp. adm. UFR).

 

Enfin, la méconnaissance dont fait preuve le Siège peut être, selon certaines UFR, à la source des représentations erronées de la réalité des UFR Le fait que les personnes du Siège ne se déplacent pas  leur interdit de constater  « de leurs propres yeux » le dénuement des UFR :

« Paris V, ils pensent qu’on est comme en médecine ! Qu’on a des moyens ! Qu’on est riche ! » (resp. adm. UFR).

Ces « idées fausses » sont d’autant plus mal vécues que certaines UFR ressentent une grande différence dans la qualité des conditions matérielles de travail entre le Siège et elles :

« Ici, on a un sentiment d’incompréhension qui est exacerbé. Au Siège, quand on voit des bureaux superbes, des personnels en surnombre, ça induit un climat de mécontentement. Certains continuent à s’investir, mais le gros des troupes trouve que ce n’est pas possible » (dir. UFR).

 

 

B. UN FONCTIONNEMENT DU SIEGE FORMALISTE ET UN CLOISONNEMENT HIERARCHIQUE

 

1. Des procédures formelles et rigides

 

Le caractère formel du fonctionnement de l’administration centrale est critiqué par les responsables des unités. Ils ressentent le formalisme dans l’ensemble des procédures, et tout spécialement dans les réunions, qui à leur avis ne sont pas suffisamment consacrées aux  problèmes concrets des services. Ainsi, ils estiment les ordres du jour trop rigides. Un responsable critique par exemple le refus de la hiérarchie du Siège d’ouvrir dans la réunion du Conseil d’administration une rubrique « divers » qui serait l’occasion pour chaque participant d’exposer les problèmes concrets propres à son unité.

 

Le fonctionnement du Siège, de l’avis des UFR, est également marqué par sa lenteur. Nous verrons plus loin en détail les problèmes qui se posent avec les différents services, mais nous pouvons déjà noter que d’une manière générale, le caractère procédurier et bureaucratique des actions du Siège est une critique récurrente.

« C’est le système et la mentalité dans l’administration. On ne répond pas vite, et c’est même devenu normal » (resp. adm. UFR).

« Le Siège : c’est une pesanteur, s’il faut parler clairement » (dir. UFR).

L’attachement aux procédures est critiqué car  les UFR n’en voient pas la pertinence. Les règles portent la plupart du temps sur  des instructions banales, sans enjeu stratégique, ce qui accentue le sentiment de « paperasseries inutiles ».

Le manque de souplesse est d’autant plus mal ressenti que certaines UFR ont le sentiment qu’elles pourraient se passer du Siège, qui représente un intermédiaire inutile.

« (si le Siège n’existait pas), ça faciliterait tout, car nous, on est géré par le Ministère, et l’Université sert d’intermédiaire, et elle alourdit. La gestion du personnel enseignant est plus rapide, car il n’y a pas le niveau de l’Université ». (resp. adm. UFR).

 

 

2. Une administration « crispée sur le sens de la hiérarchie »

 

Les UFR critiquent le cloisonnement hiérarchique de l’Université. La remontée d’informations est impossible :

« Tout est trop cloisonné, on a l’impression de se heurter à des murs. Le haut de la hiérarchie n’est pas accessible, il faut observer des règles pour se faire entendre (…) Le sens de la hiérarchie est assez poussé. Il y a des domaines inaccessibles » (resp. adm. UFR).

Certains responsables pensent que ce cloisonnement hiérarchique est tout à fait délibéré, et répond à une volonté de limiter l’influence des différentes unités en exercant une autorité formelle :

« Ici, l’autorité (le Siège) est un petit dictateur » (resp. adm. UFR).

« L’attitude du Siège, c’est ‘diviser pour mieux régner' » (resp. adm. UFR).

 

 

 

II. LA CIRCULATION DE L’INFORMATION

ENTRE LES UFR ET LE SIEGE

 

Nous retrouvons les problèmes de lenteur et de lourdeur lorsque nous analysons la circulation concrète de l’information. Nous étudierons plus loin les relations des UFR avec les différents services du Siège, puis le détail des flux d’information avec la division du personnel. Nous nous contenterons donc ici d’aborder l’analyse de la circulation de l’information dans ses grandes lignes. Le constat des interviewés porte sur plusieurs dysfonctionnements d’ordre général.

 

 

 

A. La lenteur des délais de transmission

 

Le temps de transmission de l’information de l’expéditeur au destinataire peut être assez long, compte tenu de l’éclatement de l’Université. Cette durée semble davantage résulter d’un grande nombre d’étapes dans la transmission que d’une distance géographique importante, comme l’indiquent ces témoignages :

« De Cochin à Ste Anne, il faut parfois une semaine pour que le courrier arrive » (agent)

« Ca peut prendre un temps assez long pour distribuer le courrier entre quelques rues, du Siège à l’UFR rue Serpente » (agent)

Face à cette lenteur, il existe une stratégie simple :

« Quand on est pressé, on prend le courrier externe et pas le courrier interne ! » (dir. UFR).

Dans certains « cas limites », l’extension du temps de transmission peut annuler la pertinence de l’information :

« On a eu une demande de statistiques arrivée en décembre à l’Université et le retour théorique devait être fait avant le 15 janvier au Ministère, et nous, on l’a eu après cette date » (resp. adm. UFR).

 

De l’avis de certains responsables, l’organisation de la circulation du courrier est trop hiérarchique. Par exemple à l’intérieur du Siège, certains courriers qui circulent entre les divisions doivent passer par le Secrétariat général. Par ailleurs, il y a des divisions dans lesquelles les courriers doivent être listés, ce qui fait que même si le courrier est nominatif, le document suit toute la filière hiérarchique. De même, pour les documents à envoyer, « il y a des tonnes de parapheurs qui circulent » (resp. adm. Siège).

Mais ce respect de la voie hiérarchique apparaît nécessaire à certaines personnes :

« On ne peut pas dire qu’il faut aller directement au gestionnaire, car quand il y a un problème, il faut que le responsable du service soit au courant. Il faut aussi souvent qu’il donne des instructions » (resp. adm. Siège).

Ces procédures rendent parfois difficiles de suivi de la circulation matérielle des documents :

« Quand on envoie un courrier, on n’arrive pas à savoir quand ça arrive à l’Université » (resp. adm. UFR).

« Il arrive que pendant quelques jours on perde la trace d’un courrier, on ne sait pas exactement où il est dans le circuit » (resp. adm. Siège).

 

Le courrier est transmis dans les UFR soit par courrier interne, soit par coursier (les grosses UFR ont leur propre coursier). Une fois parvenus aux services administratifs des UFR, les documents circulent plus ou moins bien selon les UFR En effet, certaines grosses unités connaissent des problèmes de distribution des courriers et de communication dus à l’éclatement géographique de l’UFR. Il peut arriver que la dispersion géographique augmente le temps de transmission de l’information :

« Avec les annexes, la transmission des documents peut prendre plusieurs jours » (dir. UFR).

« L’information ne va pas en périphérie » (dir. UFR).

« La communication est très difficile car nous n’avons pas d’unité de lieu, même au sein d’une même UFR. C’est vraiment trop éclaté » (resp. adm. UFR).

Mais il se peut aussi qu’un manque de moyens financiers interdise la duplication des documents pour leur transmission. Ainsi, dans certaines UFR, l’importance quantitative du personnel rendrait le coût  financier trop élevé s’il fallait faire une « information tournante ». Les frais de photocopies seraient trop importants par rapport au budget, étant donnée la masse d’informations générales.

 

Une fois le courrier parvenu dans l’unité géographique de travail, les formes de distribution sont variées, mais la circulation semble moins problématique.

Lorsque les informations sont générales, elles sont le plus souvent affichées. Ce mode de diffusion des informations n’est pas toujours efficace, car les panneaux d’affichage ne sont pas forcément sur le lieu de passage de tous les personnels, et même s’ils sont bien placés, ils ne sont pas toujours lus.

Lorsque le courrier est nominatif, l’information parvient au destinataire sans trop de problèmes semble-t-il :

« On reçoit des tonnes de courrier, mais il n’y a pas de problème de gestion de ce courrier. Il y a deux distributions par jour à la fac, et pas de stockage de l’information » (dir. UFR).

« Le courrier arrive deux fois par jour du Siège et de l’extérieur. La loge le transmet à la secrétaire, qui le dispatche dans des chemises par service, et qui me montre l’ensemble. Elle fait le tri avant, et elle me dit sur quoi je peux passer vite. Une fois que je l’ai vu, elle dépose les chemises dans chaque service » (resp. adm. UFR).

Ensuite, le courrier peut être remis « de la main à la main »  par le chef de service. Il peut être aussi déposé dans une « case », individuelle ou par service, que les personnes consultent régulièrement (elles sont censées regarder leur casier tous les jours, et parfois deux fois par jour). Les seuls problèmes cités par les personnels Atos-Ita relèvent de l’anecdote. C’est l’exemple du casier à courrier  qui est placé dans un lieu de courant d’air, ce qui oblige la personne qui dispatche le courrier à inscrire le nom du destinataire sur chaque document à faire circuler. Par ailleurs, le système de la feuille d’émargement accusant la réception du courrier est diversement pratiqué.

Certains responsables sont contre un envoi nominatif quand il s’agit de courrier administratif interne :

« Les documents du Siège sont ouverts au secrétariat du Directeur ou à mon secrétariat. Il n’y a pas de perte de temps (…) L’administration n’a pas à personnaliser, ça ne gagne pratiquement jamais de temps, au contraire, la lettre peut rester plus longtemps sur un Bureau si la personne est absente«  (resp. adm. UFR).

 

 

B. DES DELAIS DE REPONSE TROP COURTS EXIGES PAR LE SIEGE

 

La plainte des UFR quant au manque de temps pour renvoyer les documents est unanime. Nous aurons l’occasion, dans l’analyse des relations avec les différents services, de retrouver ce problème à de nombreuses reprises. Nous nous contenterons donc pour le moment de mentionner le sentiment de débordement qu’éprouvent les UFR :

« Ce qui est monstrueux, c’est que chaque service me demande tout pour le mois de février. En ce moment, il ne se passe pas deux jours sans que je reçoive un courrier avec des documents à renvoyer (…) Chaque service vous abreuve sans savoir si vous êtes débordé ou non, et les échéances tombent toutes en même temps » (resp. adm. UFR).

« On a un Ministère qui ne sait pas faire des comptes à rebours. Il y a déjà un retard à ce niveau, donc si ça passe encore par le Rectorat puis par le Siège, quand ça arrive ici c’est l’horreur. Il faut que ça atteigne les profs, qui se plaignent de n’avoir pas de délais pour répondre (…) C’est vrai que si on donne du temps, on prend encore plus de temps, mais il y en a marre de travailler dans une atmosphère de drame et de stress, et parfois pour une rentabilité médiocre » (resp. adm. UFR).

De plus, le Siège ne tient pas compte des éventuelles contraintes matérielles des UFR :

« On nous demande un projet pédagogique pour le Ministère. Au Siège, ils ont des Macintosh, moi pas, et notre budget de fonctionnement ne nous permet pas d’aller vers une modernisation » (dir. UFR).

 

 

C. DES DOCUMENTS INUTILES OU PEU COMPREHENSIBLES

 

Une masse très importante de documents circule entre le Siège et les UFR Des documents sont dupliqués pour parvenir rapidement au destinataire, et cela représente un progrès :

« Tout ce qui est important, on le reçoit en double. C’est nécessaire parce que le Directeur d’UFR est aussi enseignant et chercheur, donc il est souvent absent, et s’il fallait attendre qu’il ouvre le courrier ça ne serait pas possible » (resp. adm. UFR).

En revanche, certains documents sont inutiles car directement redondants. C’est le cas des envois à la fois par télécopie et par courrier :

« Les services du Siège ne se servent pas assez du fax (…). Et quand ils envoient des fax, ils envoient aussi en double le courrier, que je reçois huit jours après, c’est vraiment inutile ! » (dir. UFR).

Des interviewés critiquent également le « désordre » des envois :

« Chaque service du Siège envoie un courrier, et je peux recevoir le même jour trois courriers différents qui émanent du Secrétariat général. L’acheminement des informations devrait être revu. Il faudrait un correspondant responsable pour l’ensemble des services du Siège, car on reçoit en désordre » (dir. UFR).

Enfin, les documents ne sont parfois pas pertinents car l’information est confuse ou trop générale :

« Trois quarts du courrier va au panier sans être lu. Il y a trop de documents d’ordre général, de recommandations, d’évaluations (…). Le style est administratif et trop froid. Finalement, cette information est inefficace » (dir. UFR).

 

 

D. DES PROBLEMES MATERIELS DE CIRCULATION DE L’INFORMATION

 

Les dysfonctionnements dans la circulation matérielle de l’information qui sont mentionnés par les personnels Atos-Ita sont en général dus à un sous-équipement matériel, lui-même du à un manque de moyens financiers. Bien que l’Université ait déjà investi dans un certain nombre de moyens de communication, micro-ordinateurs et télécopies notamment, l’équipement n’est pas encore complet et toutes les liaisons potentielles ne sont pas encore possibles, car la mise en place de ces liaisons nécessite au préalable de gros travaux : réfection du système électrique pour que l’ensemble soit en 220 volts, et extension des auto-commutateurs notamment. Ceci entraîne des « aberrations », que le personnel souligne comme illustratives du (dys)fonctionnement de l’Université en général. En voici un exemple :

« Le Siège envoie un fax au labo, qui est en Sorbonne. Comme nous on n’a pas de fax, le fax arrive à l’UFR rue Serpente, qui nous appelle pour nous prévenir. Quelqu’un doit aller rue Serpente, en passant devant le Siège, pour aller chercher le fax ! » (agent).

 

 

 

 

 

CHAPITRE II

 

 

 

LES RELATIONS

 ENTRE LES UFR ET CERTAINES DIVISIONS DU SIEGE :

 

LA DIVISION DE LA SCOLARITE ET DE L’INFORMATIQUE,

 

LA DIVISION FINANCIERE ET AGENCE COMPTABLE,

 

LA DIVISION DU PERSONNEL

 

 

 

L’objectif de cette pré-enquête étant de comprendre les formes de circulation de l’information entre les UFR et le Siège, et de façon centrale l’information sur les carrières, nous n’avons pu approfondir de façon similaire toutes les relations de travail existantes.

 

Nous avons de ce fait abordé les relations des UFR avec les trois divisions du Siège en privilégiant plus particulièrement celles avec la division du personnel.

 

 

 

I. LES RELATIONS ENTRE LES UFR

ET LA DIVISION DE LA SCOLARITE

ET DE L’INFORMATIQUE

 

 

Les relations entre les UFR et la Division de la Scolarité et de l’Informatique (DSI) portent d’une part sur le suivi et la gestion de la scolarité des étudiants et, d’autre part, sur l’informatisation et notamment celle du secteur de la scolarité

Le discours des interviewés est très différencié selon qu’il s’agit de relations portant sur l’informatique ou sur des questions de pure scolarité. En effet, si les relations autour de la scolarité ne sont pas franchement positives, elles ne suscitent pas d’appréciation fortement négative. Par contre, le service informatique est jugé de façon très négative. Cependant, il faut garder à l’esprit que les personnels des UFR directement concernés par les questions de scolarité n’ont pas, au cours de la pré-enquête, été interviewés ; leur discours serait peut être moins différencié.

 

 

A. LE DOSSIER SCOLARITE : QUELQUES DIFFICULTES QUI NE SUSCITENT PAS DE REEL MECONTENTEMENT

 

1. Des relations de travail limitées entre DSI et UFR

 

UFR et DSI interviennent sur un même processus, le suivi de la scolarité, mais à des niveaux différents. Une répartition de la prise en charge des phases successives de ce suivi détermine l’intervention des uns ou des autres. Les UFR (service commun pour les UFR de sciences humaines) font ainsi remplir les dossiers d’inscriptions (ce qui signifie que l’acceptation du dossier se fait à ce niveau) puis envoient les étudiants porter leur dossier au Siège où il est saisi et où le règlement des frais de scolarité a lieu. En ce qui concerne les diplômes, les demandes d’émission sont recueillies dans les UFR, puis transmises au Siège qui assure la délivrance effective des diplômes (et des attestations). De même, les délivrances de Diplômes d’Université, de Capacités de Médecine, de Diplômes Interuniversitaires de Spécialités sont depuis peu gérées par le Siège. Les habilitations à diriger des recherches sont aussi transmises des UFR vers la DSI qui centralise toutes les demandes. Le traitement des dossiers de bourse, des allocations de DEA et de DESS, des prêts bancaires est aussi effectué au Siège.

Ce schéma de répartition des tâches est quelque peu modifié dans les UFR médicales dont l’autonomie est encore plus forte, dans ce domaine, que celle des autres UFR : les dossiers d’étudiants sont gérés au sein des UFR qui assurent aussi la délivrance des diplômes.

 

Globalement, cette répartition des tâches donne lieu à une organisation du travail ne nécessitant pas de réelle coopération mais une simple collaboration entre UFR et DSI. Ainsi, la circulation de l’information est essentiellement une circulation de documents. Des allées et retours plus ou moins longs ont lieu entre les unités de base et le Siège : la procédure pour l’obtention d’un diplôme peut, par exemple, prendre entre 3 et 6 mois en fonction des pièces présentées par l’étudiant (3 mois lorsque l’étudiant est en possession d’une attestation de réussite). Le nombre d’intervenants pour une même opération semble expliquer la lenteur de certaines procédures prises en charge par les services scolarité.

Le cas des UFR de sciences humaines illustre bien ce fonctionnement : un niveau intermédiaire, les services communs, existe entre les UFR et le Siège ; l’éclatement géographique aidant, la circulation des informations (résultats d’examens par exemple) semble très lente. Cette lenteur n’a pas été l’objet de critique sans doute parce qu’elle ne gêne pas directement le fonctionnement des personnes interviewées : il y a dans ce domaine externalisation sur les étudiants des « coûts » induits par l’organisation du travail.

 

 

2. Des difficultés plus sensibles au Siège que dans les UFR

 

Le dossier « scolarité » semble poser plus de difficultés vu du Siège que des UFR En effet, une sorte de routine caractérise le travail et les relations telles qu’ils sont décrits par les personnels des UFR Seul un responsable administratif d’UFR émet un souhait relatif à l’organisation du travail dans le domaine de la scolarité :

« Prochainement, il y a une réunion scolarité : c’est vrai que ça déplace beaucoup de personnes ; il faudrait des sous-réunions car là on reçoit des informations plus qu’on ne traite les problèmes. Mais il faut pouvoir le faire (nécessité de consacrer beaucoup de temps à ces réunions pour la personne qui les anime). » (resp. adm. UFR)

 

Quant à la DSI, si elle ne met pas en avant l’existence de problèmes entre elle et les UFR, elle souligne sa dépendance à l’égard de ces UFR et la précarité de son existence :

« Tout ce qui est examen est fait dans les UFR et il n’y a pas de retour vers le Siège; les UFR ne nous donnent pas d’information et nous ne oeuvons donc pas avoir de chiffre sur les taux d’échecs, de réussite aux examens. Et, quand le Ministère nous demande des statistiques de réussite, nous ne pouvons que nous tourner vers les UFR car je n’ai rien ici. (…) Et il y a un nouveau dossier. Ca fait trois ans qu’on tanne les UFR pour être très clair sur le type de contrôle pour chaque diplôme. » (resp. adm. Siège)

« C’est une caractéristique de la division : elle est fonction de la volonté du Président : s’il veut décentraliser, on ferme boutique ! » (resp. adm. Siège)

 

 

B. L’INFORMATIQUE : POURQUOI FAIRE SIMPLE QUAND ON PEUT FAIRE COMPLIQUE

 

1. L‘informatisation de la saisie des dossiers d’inscription, une informatisation appréciée et parfois souhaitée

 

L’informatisation des services de scolarité au sein des UFR qui en possèdent est certes une amélioration des conditions de travail souvent soulignée : la saisie des données est une phase laborieuse ; mais cela reste un progrès ponctuel qui ne porte pas sur l’organisation, la structuration proprement dite du travail :

« L’informatisation, ce n’est une amélioration significative qu’au niveau des tâches. C’est ponctuel … mais c’est énorme pour la saisie de données qui ne sera plus manuelle. » (resp. adm. UFR)

De plus, elle ne constitue pas une priorité pour toutes les UFR Dans la hiérarchie des choses urgentes, l’informatisation n’est pas toujours en première place et les contraintes de budget obligent parfois à y surseoir.

 

 

2. Une collaboration problématique entre service informatique et UFR

 

La DSI abrite un service informatique dont les services ne sont pas perçus de façon très positive par certaines UFR Une partie des personnes interviewées regrette que ce service ne constitue pas un soutien efficace et disponible lors des opérations d’informatisation des UFR :

« On ne se sent pas secondé par le Siège. Nous avons maintenant des équipements informatiques. mais cela implique une maintenance, un suivi, une formation du personnel; et pour cela, nos personnels sont livrés à eux-mêmes : il n’y a pas d’ingénieur qui vient du Siège. Il n’y a personne pour suivre, à moins de faire appel à des prestataires de service, ce qui est hors de question vu le budget de l’UFR. » (resp. adm. UFR)

D’autres contestent la façon dont la conception et la mise en place de logiciels de gestion de la scolarité ont été faites et continuent à se faire. Si le consensus semble possible sur la nécessité de cette mise en place, les moyens et les résultats portent plus à critiques :

« En matière de scolarité, nous avons un retard effrayant. Pour cela, je ne suis pas du tout content. Le matériel acheté pose beaucoup de problèmes et on ne fait que bricoler (au Siège). C’est un gâchis formidable ! Le service informatique ne marche pas du tout. Ils sont trop peu disponibles. Ils conçoivent des choses trop compliquées : pour une opération, il faut faire 10 manoeuvres alors qu’avec les logiciels qui sont sur le commerce, c’est très simple. C’est inadmissible qu’on ne consulte pas les gens sur les logiciels qu’ils désirent. (…) Nous, nous nous informatisons mais nous sommes très très peu conseillés (…) Les systèmes créés sont nuls et aberrants et la moindre modification prend de 6 mois à un an : c’est trop long. (…) Il faut où changer de personnel, ou le former sérieusement, et de toutes façons en rajouter ; donc il faut s’occuper de cela. Et le problème après c’est la maintenance : il faudrait un ingénieur de maintenance. On a des facilités qu’on utilise mal ou pas du tout. » (dir. UFR)

 

Ces critiques à l’égard du service informatique se doublent chez certaines UFR de comportements de rejet pur et simple des services de la DSI :

« Par exemple, une UFR a acheté un logiciel très cher alors qu’on l’avait ici, au Siège. C’est idiot, ils ne veulent pas avoir affaire à nous. » (resp. adm. Siège)

 

II. LES RELATIONS ENTRE LES UFR

ET LA DIVISION FINANCIERE

 

 

Le discours des UFR à propos de la DIF s’organise autour d’un double constat : les relations de travail avec la division suscitent des commentaires négatifs ; parallèlement, l’arrivée du nouvel agent comptable est un élément qualifié de positif souvent associé à une volonté de changement qui ne réussit pas encore à se concrétiser.

 

 

 

A. DES RELATIONS DE TRAVAIL QUI POSENT PROBLEME

 

 

1. des intérêts parfois contradictoires : le cas de la gestion des conventions de recherche

 

Les relations entre DIF et UFR s’établissent notamment dans le cadre de la gestion de conventions de recherche. En effet, les UFR s’efforcent de drainer des contrats de recherche. C’est en partie un moyen de financement, parallèle à celui constitué par les allocations octroyées par le Ministère. La gestion des sommes correspondantes à ces conventions présente un intérêt tout particulier pour la DIF et plus généralement l’Université :

« On essaie d’améliorer les prestations qu’on offre aux UFR (…) On a baissé les frais de gestion : on ne prélève plus que 4 % au lieu de 8 %. Ca nous a amené de nouveaux contrats. (…) Les sommes qui transitent créent un flux de trésorerie qui permet de placer l’argent au jour le jour et de générer des intérêts. (…) mais on est pas informé de toutes les conventions. » (resp. adm. Siège)

Cette logique ne « séduit » pas toutes les UFR, certaines préférant gérer elles-mêmes leurs conventions :

« Le prélèvement de l’Université sur la recherche ne doit pas être lourd ; au maximum il doit atteindre 2% et encore, si on précise au niveau des résultats que la recherche a été faite à René Descartes, j’estime qu’on a renvoyé l’ascenseur. » (dir. UFR)

« La recherche de conventions ne peut être qu’individuelle. Elle est faite par le professeur du labo et ne peut être faite par l’Université. Chacun doit aller à la pêche ! » (resp. adm. UFR)

Ainsi, les relations entre UFR et DIF se heurtent pour une part à une opposition d’intérêts qui dessert dans un premier temps la DIF.

 

 

2. Des difficultés à se comprendre

 

La DIF est perçue comme une division avec laquelle les relations sont compliquées : les problèmes portent dans un premier temps sur des difficultés de compréhension des documents transmis :

« Les problèmes budgétaires, ça se passe très mal ! Il n’y a rien d’écrit convenablement et on ne comprend rien ! Et, quand on comprend, c’est pour voir qu’ils se sont plantés ! On a perdu une somme d’argent comme ça, qu’ils n’ont retrouvée qu’après un temps fou. » (dir. UFR)

« Une des communications difficiles, c’est quand il faut expliquer les budgets. On ne comprend rien. Il y a un problème d’ésotérisme du langage. Il y a trop de sigle et c’est mauvais (…) Si on veut ne pas communiquer, il n’y a rien de tel que le métalangage ! » (dir. UFR)

Ces problèmes semblent notamment se poser au sujet de l’état des comptes : la DIF transmet aux UFR des états qui souvent ne concordent pas avec ceux établis par les UFR

« Les listings qu’on reçoit ne sont pas très lisibles. On est obligé de tenir nos comptes à la main et de vérifier. Une collègue va à l’Université avec ses bons de commande et on n’est jamais d’accord. » (resp. adm. UFR)

« Les comptes utilisateurs ! Il faut être initié ! C’est compliqué. Tout ça c’est du chinois pour moi. Et puis, récemment, j’ai eu un problème pour 300 francs qui sont du « débit » mais qu’ils ont mis dans « crédit » car ils ne savaient pas où les mettre. » (agent)

Cette difficulté est sans doute à rapprocher de la coexistence, au niveau de la DIF, de systèmes comptables différents : un système par fonctions (Administration, Enseignement, Logistique, Recherche) et le système du plan comptable. Il reste cependant que la DIF apparait comme une unité relativement opaque : les UFR ne perçoivent pas toujours la logique ou les raisons sous-jacentes de certaines opérations effectuées par la division.

Ainsi, l’évaluation du coût de l’étudiant demandée par la DIF aux UFR a semble-t-il rencontré ce type de difficulté : certaines UFR, dépitées par la faible incidence de ce travail sur leur nouveau budget, adoptent un discours très négatif à l’égard de la DIF :

« On a le sentiment que Paris V se paie notre tête (…). Ils nous coûtent du temps. Ils s’enflent tous seuls et s’autogèrent à Paris V ! » (resp. adm. UFR)

 

 

3. Une volonté de simplification qui n’est pas ressentie par les UFR

 

Les efforts de simplification faits par la DIF ne sont pas perçus par les UFR, ni les difficultés que la division peut rencontrer. Une méconnaissance des réalités de travail des uns et des autres alimentent le sentiment que la DIF complexifie à souhait des opérations que les UFR considèrent comme des tâches ne posant pas de problème spécifique :

« Etudier des budgets, même pour 16 ou 17 UFR, ça n’est pourtant pas compliqué ! » (resp. adm. UFR)

« Le service financier à l’Université, c’est très complexe ! Car ils doublent, triplent les opérations. Tout est à revoir (…) Ici, c’est simple, le service financier ! » (dir. UFR)

Cette volonté de simplification connait par ailleurs ses limites : des contraintes relevant par exemple du Ministère déterminent le champ du possible en matière de documents comptables et financiers disponibles à l’Université :

« On utilise un logiciel du Ministère qui est assez vérouillé et pas facile à modifier. On n’obtient pas facilement que les états mensuels soient plus lisibles, mais, on a déjà obtenu des analystes qu’ils nous sortent quelque chose tous les mois : avant, c’était tous les deux mois. » (resp. adm. Siège)

 

 

4. Un problème de transmission de documents

 

Outre ces problèmes de contenu de l’information circulant entre UFR et DIF, une question de transmission tardive des documents se pose. Cette difficulté ne peut être ici analysée de façon très précise dans la mesure où nous avons, comme source d’information, uniquement le point de vue des UFR Cependant, les incidences de ce dysfonctionnement ne sont pas négligeables au sein des UFR et restent une des sources de mécontentement à l’égard de la DIF :

« Pour le budget de l’UFR, il me faut 14 jours pleins pour convoquer mon Conseil afin de présenter le budget. Cette année, j’ai anticipé en me disant je le convoque avant même que le Siège m’envoie le budget ; mais j’ai mal anticipé car le Siège avait plus de retard que je ne l’avais prévu, donc il m’a fallu annuler la réunion du Conseil. Ca m’a coûté 30 photocopies et j’ai perdu un temps fou. » (dir. UFR)

« Les transmissions de documents en retard, ça peut être grave s’il s’agit par exemple d’une demande de budget pas faite à temps car après faudra se limiter à ce qu’on a. » (dir. UFR)

 

 

 

B. Des dysfonctionnementS qui génèrent des comportements variés

 

 

Confronté à ce type de difficulté, le personnel des UFR répond en adoptant des stratégies différentes. La pré-enquête permet notamment de repérer un comportement d’anticipation que seules les UFR ayant un personnel en poste depuis longtemps et possédant, de ce fait, une certaine pratique des questions financières et comptables peuvent avoir :

« Mon personnel subit le fait des problèmes de délais. Mais, ils connaissent tellement bien (…) qu’ils anticipent (…) Ici, les réflexes administratifs sont heureusement très développés. » (resp. adm. UFR)

Anticiper ne permet cependant pas de prévenir toutes les catégories de problèmes. La nécessité pour les UFR de tenir leurs comptes de façon parallèle à la DIF constitue, par exemple, un des moyens que les UFR ont trouvé pour pallier aux difficultés qu’elles rencontrent. De même, la nécessité pour les membres d’un certain nombre d’UFR de se déplacer régulièrement pour se rendre personnellement à la DIF, semble relever des conséquences « imprévues » de l’organisation actuelle de la gestion financière et comptable de l’Université.

« Les relations personnelles sont très importantes donc on doit toujours être sur la brèche alors que ça devrait fonctionner normalement. C’est une grande perte de temps » (dir. UFR)

« Notre service comptable travaille avec l’agence comptable de l’Université. Ca marche bien que parce que notre comptable va à l’Université tous les 3 à 4 jours. » (resp. adm. UFR)

 

Sans que les difficultés puissent être plus précisément identifiées, il apparait que les relations avec la DIF sont loin d’être évidentes et simples. Même si une certaine « bonne volonté » de la DIF est parfois soulignée par les interviewés, il n’en reste pas moins qu’une étude plus appronfondie permettrait de mettre à jour d’autres pratiques parallèles et individuelles destinées à résoudre les difficultés de travail que rencontrent à la fois les UFR et la DIF. La connaissance de ces pratiques et des contraintes précises qui pèsent sur les différents individus permettrait en effet de saisir la nature et les causes des difficultés, tout en déterminant les marges de manoeuvre possibles au sein desquelles des améliorations pourront être pensées. Cette analyse semble d’autant plus nécessaire que la question financière apparait comme une question cruciale pour des UFR qui sont souvent amenées à gérer la pénurie et de ce fait à être extrêmement vigilantes sur la façon de gérer leurs budgets.

 

III. LES RELATIONS ENTRE LES U.F.R.

ET LA DIVISION DU PERSONNEL

 

 

A. LES OPINIONS SUR CES RELATIONS

 

Les relations entre la DIP (division du personnel) et les différentes UFR interviewées sont globalement négatives. Les problèmes peuvent être repérés à plusieurs niveaux d’analyse.

 

 

1. La circulation de l’information administrative routinière : lenteur, délais trop courts et retards

 

Le premier type d’informations circule essentiellement sous la forme de documents écrits et relève de la gestion quotidienne des personnels. Comme nous le verrons dans le détail de l’analyse des différents flux d’information, ces relations sont fortement structurées par des contraintes formelles, c’est-à-dire des règles administratives sur lesquelles les individus n’ont pas de prise : il s’agit de dates de retour de documents destinés au Ministère, de procédures d’inscriptions à des concours, de procédures d’avancement ou de nomination par exemple.

Aucun jeu ne peut s’organiser sur le contenu de ces règles : les individus ne peuvent influer que sur la circulation et la diffusion des documents et les problèmes sont des problèmes de lenteur et de retard.

 

L’information qui part de la division du personnel au Siège est en général envoyée à plusieurs destinataires dans les unités, pour parvenir à la personne réellement concernée et éviter des retards.

« Au niveau hiérarchique, théoriquement on ne connaît que le Directeur de l’UFR. Mais les trois quart du temps, si vous avez une note et si vous voulez qu’elle vous revienne dans les délais, il faut l’envoyer aussi aux chefs de division et aux chefs de service » (resp. adm. Siège).

Mais le circuit de diffusion reste long, et la contrainte de temps se fait de plus en plus sentir au fur et à mesure de la descente des échelons, chacun prenant sa marge de temps pour ne pas se retrouver « étranglé ».

Par exemple, les fiches de notation doivent être retournées cette année au Ministère le 15 avril. Le service du personnel Atos-Ita envoie aux UFR les documents relatifs à la notation et les fiches le 14 janvier, le délai de retour étant fixé au 24 février. Le service du personnel justifie les sept semaines de délais (24/2 – 15/4) par la nécessité de classer les fiches, de constituer les tableaux récapitulatifs et de faire annoter les fiches par le Président. Mais, compte tenu des temps de transmission, les délais impartis (14/1 – 24/2) sont jugés beaucoup trop courts par les UFR

 

Une autre source d’accroissement du temps de transmission provient du fait qu’avec certains documents ministériels, la DIP envoie un texte explicatif résumé. En effet, par exemple pour les Ita, le service du personnel reçoit une note une fois par an du Ministère, qui récapitule les procédures à suivre en matière de promotion des gradés de corps, mutations et réintégrations, notation et détachement. Le service du personnel envoie cette note aux directeurs d’UFR en l’état au mois de septembre, puis envoie au cours de l’année, et en fonction du calendrier des différentes procédures, des circulaires détaillant chaque point.

Cette procédure est perçue comme une perte de temps par certains responsables administratifs :

« Souvent, on est traité comme des petits enfants, car le Siège trouve le moyen de faire une lettre plutôt que de transmettre la circulaire du Ministère tel quel. Ca prend une dizaine de jours, et pour moi, ça me fait dix jours de perdus. En général, la lettre dit exactement pareil. S’ils doivent indiquer la date de retour, il suffirait qu’ils mettent un tampon » (resp. adm. UFR).

 

Enfin, la longueur des délais peut être due à la multiplication de vérifications successives. C’est le cas pour les salaires, où les trois mille fiches de paie sont vérifiées systématiquement à priori, avant d’être envoyées à la Paierie :

« Les personnels des UFR viennent au service des traitements. Le problème, c’est que le service n’envoie pas les fiches de paie suffisamment vite car les personnes du service veulent faire des vérifications. C’est un défaut d’organisation. Avant, on éditait deux fiches. Maintenant, on n’en édite plus qu’une seule et on a le double sur microfiches. Sur les micro-fiches, on ne peut vérifier que des cas ponctuels mais on ne peut pas faire des contrôles en séries. Elles y tiennent à ces contrôles des fiches avant la transmission à la Paierie. Par exemple, ils vont vérifier que la naissance d’un enfant a bien été enregistrée ; mais des vérifications comme ça retardent l’envoi de deux à trois semaines ! »  (resp. adm. Siège).

 

La première hypothèse, relative à la contrainte de délais, est que cette contrainte semble résulter de l’accumulation d’une succession de micro-contraintes due au nombre important d’étapes dans la circulation des documents. Chaque échelon a ses propres contraintes et en externalise une partie sur l’échelon inférieur, et se justifie en invoquant  ses propres obligations vis à vis de l’échelon supérieur (l’Atos ou l’enseignant vis à vis de l’UFR, l’UFR vis à vis du Siège, et le Siège vis à vis du Ministère).

La deuxième hypothèse, relative à la lenteur de la circulation de l’information, est que cette lenteur, unanimement constatée et critiquée, semble être elle aussi davantage le résultat d’une succession de micro-retards à chaque étape que de blocages longs à une étape clairement identifiable.

 

 

2. La résolution des problèmes singuliers : une application trop stricte de la règle administrative et une méconnaissance du terrain

 

La DIP, de l’avis des UFR, n’offre pas assez de souplesse dans la résolution des problèmes, et bloque des dossiers par une application trop stricte des règles :

« La division du personnel, c’est abominable ! Par exemple, on doit faire des arrêtés de nomination de chefs de services, ce que nous faisons. On transmet ensuite au service des traitements. Ca doit être signé par une personne de l’Assistance. Une fois, cette personne était en vacances donc on nous a renvoyé les documents avec un cachet signé mais pas la signature de la personne théoriquement responsable puisqu’elle était absente. Nous, on a transmis sans même voir la moindre possibilité de problème. C’est fréquent de mettre un cachet signé. La division du personnel a refusé ce cachet car ils voulaient la signature de la personne qui était en vacances. Cette histoire concernait le traitement de près de cent personnes qui n’allaient pas être payées. J’ai téléphoné au Président, qui est chef de service et qui, de ce fait, avait des membres de son personnel concernés, et ça a été débloqué très vite. La division du personnel, il lui manque de la souplesse et de la diplomatie donc elle nous bloque » (resp. adm. UFR).

 

D’autre part, les UFR se plaignent du fait que la division du personnel méconnaisse le terrain. Les responsables administratifs ont le sentiment que les services du Siège sont coupés des réalités et ignorent ce qui se passe dans les UFR :

« Le problème de l’administration centrale, c’est qu’ils sont coupés du terrain car ils ne voient ni les enseignants, ni les étudiants, qui ne vont pas là-bas. Eux, ils travaillent sur dossiers et nous avec les gens, donc on s’adapte aux problèmes »  (resp. adm. UFR).

« Les services du personnel n’échangent que du papier et des coups de téléphone ; ils ne se connaissent pas »  (resp. adm. UFR).

Les personnels des UFR ont en effet à gérer une pression qui ne pèse pas directement sur les services du Siège. Ces derniers ne sont pas directement concernés par les situations que les UFR leur exposent et ils ne sont pas impliqués dans des relations de face-à-face avec leurs interlocuteurs. En général, cette relation passe soit par le canal du téléphone, soit par l’intermédiaire d’un responsable de l’UFR. Dans les deux cas, il n’y a pas de contact direct et la pression sur la DIP, dans le sens de la recherche d’un « arrangement », est moins forte. La résolution des « problèmes », c’est-à-dire de tout ce qui n’est pas routinier, semble en effet toujours passer par une relation entre deux individus qui se connaissent personnellement : le responsable administratif de l’UFR et une personne au Siège qui se situe à un niveau hiérarchique au moins équivalent (chef de bureau, chef de division, voire Secrétaire général ou Président).

 

 

3. Le traitement des « problèmes sensibles », salaires et évolution de carrière : une attention insuffisante au suivi des dossiers

 

Le problème du suivi des dossiers suscite beaucoup de remarques négatives de la part des UFR Ainsi à propos d’une anecdote autour d’une question d’avance sur salaire :

« C’est moi qui ait dû tout gérer. Eux, ils ne font aucun suivi des dossiers au Siège. On leur signale des cas mais si on ne relance pas, ils ne font rien. Alors, on vous explique où il y a eu des loupés et puis voilà ! On vous explique pourquoi ça n’a pas marché ! » (resp. adm. UFR).

 

Une autre personne évoque un dysfonctionnement à propos de calculs d’heures supplémentaires :

« On s’est aperçu que ce qu’ils (le service du personnel du Siège) avaient transmis au Rectorat ne correspondait pas à notre tableau récapitulatif. On a téléphoné immédiatement au service du personnel titulaire. La responsable était partie pour trois semaines en vacances, et personne ne pouvait dire pourquoi les heures supplémentaires étaient payées 60 francs et non 560 francs. C’est grave, parce que si on ne conteste pas assez vite, si c’est engagé au niveau du Rectorat, on ne peut plus rien faire » (resp. adm. UFR).

 

Ce problème de la prise en charge des questions relatives aux carrières des personnels génére des mécontentements d’autant plus vifs qu’il porte sur des éléments très sensibles pour les Atos et Ita : leur salaire et leur évolution de carrière.

« C’est anormal quand il s’agit de salaire, qu’on ne renseigne pas les gens »  (resp. adm. UFR).

« Pour le service des traitements, il y a beaucoup de relations téléphoniques et de visites, à propos des fiches de paie par exemple, ou pour débrouiller des problèmes d’allocations familiales. Expliquer tout cela prend du temps et les personnes sont agressives » (resp. adm. Siège).

 

L’indignation est vive également chez les personnels Atos-Ita :

« Il y a un électricien qui n’a pas été payé pendant quatre mois. Et ils disent ‘ah mais c’est logique, c’est comme ça' » (agent).

« Moi, c’est la caisse noire du labo qui m’a payé mes premier mois » (agent).

« Chez nous, c’est le doyen qui fait des avances » (agent).

 

 

4. La « gestion des problèmes » : une concurrence entre Siège et unités et un renvoi mutuel des responsabilités

 

Les tensions entre les UFR et la DIP se cristallisent autour du partage des responsabilités. Il semble que la DIP apparaisse aux yeux des unités comme un service qui impose des contraintes sans offrir aucune aide.

 

En effet, d’une part la division du personnel bénéficie de prérogatives que les UFR contestent, qui concernent notamment le recrutement. Par exemple la DIP, utilisant une des rares marges de liberté qui lui soient laissées, peut choisir les affectations des personnels lorsqu’il y a plusieurs postes à pourvoir :

« Un poste de secrétaire d’administration est vacant donc l’Université met au concours en avertissant le Ministère; et c’est le Ministère qui nomme sur Paris V une personne. Prenons le cas où deux postes sont à pourvoir à Paris V dans deux UFR différentes. Il faut alors choisir qui va où ! La DIP choisit souvent et elle se plante car elle ne connait pas ce qui est fait (dans les UFR) donc, on discute et on se dispute » (resp. adm. UFR).

 

Mais d’autre part, la division du personnel ne répond pas aux attentes des UFR Certaines contraintes d’ordre statutaire pèsent sur la DIP, qui l’empêchent semble-t-il de résoudre tous les problèmes. Elle cristallise alors contre elle le mécontentement des UFR :

« J’ai de graves problèmes de personnels (problèmes de comportement) et quand j’ai essayé de le dire à Paris V, la DIP, ils ne m’ont pas donné d’aide. Quand on a un problème grave, on n’a jamais d’écoute ni d’aide »  (resp. adm. UFR).

« Par exemple, le remplacement d’une personne en disponibilité de 6 mois. Si à la fin de ces 6 mois, cette personne prolonge sa mise en disponibilité de 6 mois, il y a un problème qui se pose pour la personne qui remplace car à la fin des 6 premiers mois, il y a arrêt du traitement car il y a arrêt de la première nomination. La personne remplaçante n’a pas de traitement pendant 4/5 mois avant qu’il y ait un nouvel arrêté de nomination correspondant à la prolongation de 6 mois. (…) donc à l’Université, on a voté pour que l’on puisse prêter de l’argent au personnel »  (resp. adm. UFR).

 

 

5. Un double travail, qui engendre un sentiment de lourdeur et d’inutilité

 

Les UFR, sans avoir la gestion réelle des dossiers, ont pour mission de répondre aux personnes. Ceci les conduit en général à dupliquer les informations qu’ils transmettent au Siège, pour en conserver une trace.

Un exemple est celui de la circulation des dossiers maladies. Une masse importante d’informations qui transitent entre les unités et le service du personnel du Siège, touche tout ce qui est relatif aux arrêts maladies. Des documents partent de l’UFR à deux moments : pour signaler le départ en congé maladie (arrêt du médecin accompagné d’un bordereau rempli par l’UFR mentionnant nom et grade de la personne), et pour signaler le retour de la personne à son travail. Les services du Siège adressent ensuite ces documents au Rectorat.

Au sein des unités, ce système est perçu comme lourd et lent, notamment dans les UFR qui possèdent un service du personnel, où les responsables ont le sentiment que le travail est fait en double. En effet, le service du personnel de l’UFR doit transmettre tous les documents à la division du personnel, au Siège, qui elle-même les transmet au Rectorat. Mais en même temps, s’il veut pouvoir répondre aux agents et ne pas les renvoyer au Siège, il est obligé de garder une trace des dossiers.

 

 

En conclusion, nous pouvons constater que les relations entre les UFR et la DIP sont marquées par une tension assez forte, et que chaque partie se renvoie mutuellement la responsabilité des dysfonctionnements. Tout un ensemble de remarques s’organisent autour du rôle d’expert de la DIP. Les UFR se plaignent de ne pas obtenir du Siège des réponses à leurs questions alors que, parallèlement, la DIP se plaint d’être sollicitée inconsidéremment par les UFR :

« Le personnel ouvrier peut demander des informations relatives aux changements d’échelon, ou ‘quel concours je peux passer ?’ En étant responsable d’un service, je peux essayer de répondre à toutes sortes de questions. Mais je ne peux répondre que de manière superficielle. Je pourrais toujours aller chercher dans le recueil des lois et des réglements (…) Les questions touchent à des points sensibles pour les Atos, leur carrière et les salaires. Le Siège renvoie trop souvent les personnels aux UFR lorsqu’ils appellent. Il y a des contractuelles au Siège qui ne connaissent pas bien le terrain et qui se disent qu’il y a ce qu’il faut sur le terrain pour renseigner le personnel. Or, c’est faux : ça dépend des UFR. » (resp. adm. UFR).

 

« On est censé connaitre l’ensemble des statuts. Tous les cas particuliers, c’est à nous de trancher. (…) Les chefs de bureau ont trop d’appels d’Atos ou d’Ita moyens qui durent dix minutes à un quart d’heure ; du type ‘j’ai entendu dire, je voudrais savoir si c’est bien ça, …’. »   (resp. adm. Siège).

 

A travers l’expression de cette concurrence entre Siège et unités se pose la question plus générale propre à toute organisation éclatée : comment maintenir le contrôle d’une gestion unique, tout en déléguant une gestion directe au niveau des unités, sans créer une pléthore de documents administratifs ?

 

 

B. LA CIRCULATION DE L’INFORMATION DESTINEE AUX PERSONNELS ATOS-ITA

 

 

D’une manière générale, les personnels Atos-Ita se disent mal informés. Ce sentiment d’une mauvaise information provient non pas d’un manque d’informations en volume, mais consiste en une remise en cause de la qualité et de la pertinence de l’information.

La critique des personnels s’exprime sous la forme paradoxale de « trop de paperasses » d’une part, et de « manque d’information » d’autre part.

 

1. Le « trop de paperasses »

 

Le canal d’information cité le plus fréquemment est la « brochure », terme qui semble recouvrir une grande partie des informations écrites qui circulent et touchent le personnel : informations relatives aux stages, aux concours, informations syndicales,….

Si les brochures « informent », « renseignent », permettent de « s’y retrouver » voire de « s’instruire », elles sont perçues par les personnels comme n’étant pas suffisamment claires ni détaillées.

 

La prédominance de l’écrit dans le mode de circulation de l’information formelle destinée aux personnels Atos-Ita alimente le sentiment de « trop de paperasses », pour un résultat qui n’est pas toujours très visible.

Outre la quantité de documents qui circulent, il semble que plusieurs autres phénomènes renforcent ce sentiment :

 

une diffusion des documents pas toujours suffisamment « ciblée », et donc des destinaires peu ou pas concernés par l’information : par exemple à propos de documents relatifs aux concours :

« J’ai souvent des brochures qui ne m’intéressent pas du tout, car aucune des spécialités dont je relève n’est traitée là-dedans » (agent).

 

une information redondante, qui lasse et évoque l’immobilité :

« Ce qui est marqué est déjà sur d’autres brochures, on n’avance pas plus » (agent).

Les documents qui contiennent des informations redondantes sont survolés et jetés rapidement, et cette pratique engendre un sentiment d’inutilité et de gaspillage.

 

une information qui bouge et donne lieu à des documents successifs, qui sont perçus comme « contradictoires » : par exemple pour de nouveaux concours mis en place, une première brochure indique le retrait des dossiers fin juillet pour une clôture des inscriptions en août, puis une seconde informe du report de la date de retrait à octobre, puis une troisième d’un nouveau report à décembre, « et à chaque fois c’est un nouveau document ».

 

2. Le sentiment d’un « manque d’information »

 

Lorsque les brochures sont de qualité (facilement compréhensibles, information qui concerne le destinataire…), il reste le problème de la pertinence des informations par rapport au problème singulier de la personne.

 

L’écrit est le principal support formel d’informations destinées aux personnels Atos-Ita. Or le caractère non-interactif de l’écrit en fait un bon support pour des informations générales, mais ce mode de communication est par définition inadapté aux cas particuliers. L’information écrite, impersonnelle, inadaptée aux problèmes singuliers, contraint la personne à rechercher l’information pertinente par d’autres voies, notamment orale.

 

Le sentiment de manquer d’information semble provoqué par la difficulté à obtenir cette information orale personnalisée, qui nécessite d’une part de repérer le bon interlocuteur, et d’autre part d’arriver à accéder à lui.

 

Quelques personnes susceptibles d’informer les personnels sont bien repérées : sur le lieu de travail, les interlocuteurs cités sont les secrétaires, les attachés administratifs, les chefs, le service du personnel s’il existe. Dans les unités, le Directeur d’UFR ou le Doyen n’intervient pas comme personne ressource, « c’est la responsable administrative qui nous gère ». Au Siège, les Atos-Ita repèrent les responsables du service du personnel.

 

Pour résoudre un problème relatif à une feuille de paie, des points de retraite, un congé ou une inscription à un concours, les pratiques des agents varient.

Lorsque la personne travaille dans une unité qui possède un service du personnel (les facultés de médecine, droit et pharmacie par exemple), elle peut s’y adresser. Ces services semblent pertinents, dans les grosses unités, pour résoudre les questions quotidiennes :

« On est servi plus vite. Par exemple, lorsqu’on a un dossier de concours à remplir, on obtient les photocopies rapidement » (agent).

D’ailleurs, certains responsables administratifs affirment que les services du personnel ne désemplissent pas, et qu’ils sont un maillon indispensable :

« La gestion du personnel en direct est nécessaire, car elle permet de répondre rapidement aux demandes d’ordre social des Atos-Ita » (resp. adm. UFR).

« Le service du personnel, c’est le passage obligé. Ils font les dossiers du nouveau personnel, les fiches de notation, les certificats maladies, ils répondent aux enquêtes sur les départs à la retraite etc.. » (resp. adm. UFR).

 

Néanmoins, il semble qu’un grand nombre de questions remonte jusqu’au Siège. La présence de services dans les unités ne suffit pas à décharger la division centrale du personnel, qui se sent débordée de travail et d’appels téléphoniques. Ces appels proviennent de trois sources principales :

– d’une part des services du personnel des unités, qui ne sont pas toujours à même de répondre, les personnes qui sont affectées dans les UFR n’étant pas forcément compétentes pour résoudre des problèmes très pointus. Dans ce cas, elles s’adressent au service du personnel du Siège. En effet, il semble qu’il soit difficile de concilier rapidité et profondeur de l’information. Certains agents ont l’impression qu’ils peuvent obtenir des informations complètes et détaillées au Siège, alors que le service de l’unité est utile pour répondre « aux questions banales ».

– d’autre part, conscients de ce fait, de certains agents, qui anticipent l’incapacité du service de l’unité à répondre, et téléphonent directement à la division du personnel :

« je ne passe pas par l’UFR. Si je vais voir la responsable du personnel, elle va téléphoner au Siège, donc je le fais directement » (agent).

– enfin, du personnel dépendant directement des services centraux.

 

Il semble que nous nous trouvions, en ce qui concerne la DIP, face à une contradiction classique en terme de gestion des ressources humaines : soit l’accès aux responsables n’est pas filtré, et les personnes sont submergées d’appels, car l’employé cherche en général à avoir accès au plus haut de la hiérarchie (son problème lui semblant toujours prioritaire), soit l’accès à la hiérarchie est filtré, mais alors les personnels se plaignent de l’inaccessibilité de leurs supérieurs.

Cette contradiction n’est pas facilement résoluble, car la volonté d’entrer en contact avec ses supérieurs dépasse souvent le besoin d’obtenir une information concrète et exprime davantage un besoin de reconnaissance de l’ordre de l’affectif.

 

Lorsque les personnes respectent les voies hiérarchiques pour obtenir une information, elles trouvent le circuit long et complexe. Ainsi un agent estime en parlant d’une question de rachat de points de retraite :

« pour comprendre, il faut se déranger et demander à l’administration. Au niveau administratif au Siège, on a vu mon dossier plus sérieusement. Mais j’ai dû téléphoner, prendre un rendez-vous, venir de l’UFR… C’est compliqué » (agent).

Une autre personne, à propos d’un problème d’équivalence de diplôme qu’elle souhaite faire reconnaître aux yeux de son Université, espère obtenir un rendez-vous avec M. Potier. Elle retrace ainsi le cheminement supposé de ses démarches :

« Pour mon problème d’équivalence, mon service du personnel n’a pas pu me répondre. La responsable était débordée, et c’est resté en plan. Je vais peut-être essayer d’aller chez M. Potier. J’obtiendrai le téléphone du Siège à mon service du personnel, et je téléphonerai au Siège » (agent).

D’autres employés courcircuitent les voies hiérarchiques en utilisant les réseaux d’interconnaissances personnelles. Ils s’appuient sur des personnes qu’ils connaissent par d’autres contacts que ceux strictement professionnels (liens amicaux, liens associatifs, liens syndicaux) pour accéder à l’information.

La capacité à obtenir la bonne information dans des délais courts dépend alors de la capacité des personnes à entretenir et maîtriser un circuit d’information « informel ». Ainsi une personne obtient des renseignements grâce « à un collègue qui s’occupait du syndicat, et qui a des relations au Ministère ». Lorsque par cette source il a une « petite information », il téléphone à la DIP pour avoir une confirmation ou des détails.

Cette pratique semble assez fréquente et explique que, comme nous l’avons vu, les membres de la division du personnel Atos-Ita estiment leur charge de travail parfois excessive et se plaignent du nombre d’appels.

 

 

C. LES FLUX D’INFORMATION

 

1. La notation : un système décrié par tous, contraignant et inutile

 

a. Une circulation de documents dépendante de l’organigramme formel et jugée infructueuse

 

La circulation de ce type d’information est facilement repérable car il s’agit d’une circulation de fiches de notation. Celles-ci sont émises par le Ministère, transmises à la division du personnel de l’Université puis aux unités de base (UFR ou services). Les responsables de ces unités (Directeurs d’UFR ou responsables de division) doivent signer les fiches de notation de leur personnel. Cette notation est prise en charge par les responsables des différents niveaux hiérarchiques, chacun notant ses subordonnés directs, les fiches remontant ainsi des filières hiérarchiques plus ou moins longues en fonction des UFR ou des services.

 

Ce système d’évaluation est critiqué dans la mesure où la marge de liberté des personnes chargées de la notation est infime. S’il n’y a pas lieu ici de reconstituer le détail des pratiques de notation, souligner cette absence de marge de manoeuvre permet en partie de comprendre l’agacement des interviewés à l’évocation de ce thème :

« La notation, ça ne sert à rien et je m’en fous; 17, c’est une note épouvantable ! »  (dir. UFR)

« La notation, c’est ridicule; ça ne rime à rien. (…) Même si on n’est pas content de quelqu’un, on ne peut pas baisser sa note. »  (dir. UFR).

« C’est une rubrique débile. On ne peut rien faire pour quelqu’un (dont on est satisfait). C’est barbant ; il y a pas mal à gratter. »  (resp. adm. UFR).

« La notation ne sert pas à grand chose ; (…) c’est extrêmement compliqué pour baisser une note : il faut faire un rapport. » (resp. adm. UFR).

« Il y a des règles : on peut augmenter de 0,5 sans rien justifier. Si on baisse ou si on augmente plus, il faut faire un rapport. » (resp. adm. Siège).

Cet agacement est dans certains cas renforcé par l’impératif de temps qui pèse sur cette tâche : ces fiches de notation doivent être remplies dans un délai parfois perçu comme étant trop court, d’autant que cette tâche nécessite un temps minimum (incompressible) de travail : il faut remplir chaque feuille de notation, communiquer la note à la personne concernée puis faire une photocopie de ce document afin d’en garder une trace écrite qui servira de point de référence l’année suivante. Nous retrouvons ici les contraintes de la double gestion, la nécessité d’une part de centraliser les documents, et la nécessité d’autre part d’en garder trace dans les unités. Toutefois, si le sentiment de faire un travail inutile est unanime, seules les unités abritant beaucoup de personnels administratifs et techniques affirment manquer de temps pour remplir ces fiches.

 

Le système de notation n’est pas plus apprécié du côté du personnel Atos-Ita.

La notation, procédure régulière chaque année en mars-avril, n’est que rarement l’occasion d’une discussion ou d’un échange fructueux entre les échelons hiérarchiques. Si certains agents estiment que lors de l’entretien « on peut discuter », les autres présentent l’entrevue plutôt comme un rituel assez stérile, voire inutile.  :

« C’est mon attachée qui me note. Ca passe par la SASU, et moi, je suis convoqué pour signer »  (agent).

« Mon patron se met chaque fois en rage. Il est persuadé que ça ne sert à rien, et il met 20 a tout le monde » (agent).

 

L’effet de la notation est perçu comme relativement négligeable :

« Ca n’a pas d’intérêt, il n’y a rien de concret. C’est très long pour l’avancement, en 15 ans, j’ai du gagner 3 ou 6 mois » (agent).

« On gagne quelques mois, ou quelques semaines dans les avancements. Quand on tourne entre 19,5 et 20, on monte d’un dixième, et on reçoit un mot du Secrétaire général qui nous dit que notre avancement arrivera plus vite » (agent).

« La notation ne sert plus à rien quand on est à la note maximale. Avant, c’est un petit coup de pouce » (agent).

 

Les autres critiques des personnels portent :

– sur le caractère infantilisant du système : « Noter les gens sur le boulot, ça veut dire qu’on est à l’école » (agent)

– sur l’impossibilité dans les faits d’obtenir réparation en cas de note baissée : « Normalement, on peut faire appel, mais ça ne sert à rien, ça n’aboutit jamais à rien » (agent)

– sur la confusion entre les avancements normaux et ceux dûs à la notation : « Il faut se méfier. J’ai un collègue, on lui a dit qu’il avait une bonification, alors que c’était un changement normal à l’ancienneté » (agent).

 

 

b. Un service du personnel écartelé entre des impératifs ministériels et sa dépendance à l’égard des UFR

 

La division du personnel du Siège a des impératifs à respecter : des contraintes de rendu des documents à une date précise lui sont imposées par le Ministère :

« Maintenant, on tient les délais (du Ministère) donc si une UFR ne tient pas ces délais, le couperet tombe. (..) les fiches de notation, c’est surtout le problème des UFR médicales » (resp. adm. Siège).

La division du personnel semble décidée à ne pas transiger sur les délais de retour pour les UFR :

« les délais ne sont pas négociables (…) chacun a ses impératifs » (resp. adm. Siège).

Ainsi, le non respect des délais est une source potentielle de tension dans la mesure où les dossiers remis en retard ne sont pas pris en considération, ce qui peut donner lieu à des revendications syndicales et en bout de chaîne, se retourner contre la division du personnel. Elle sera accusée de négligence même si le non respect de la date de remise des dossiers relève d’une suite de micro-retards et n’est pas imputable directement au service du Siège. En effet, c’est la division centrale du personnel qui est présente en commission paritaire locale et qui, de ce fait, est directement confrontée aux représentants syndicaux.

 

Les informations relevant de la notation des personnels connaissent donc des problèmes liés au délais imposés par le Ministère mais aussi au système proprement dit de notation. Cette double contrainte joue en défaveur de la division du personnel à l’égard de laquelle se cristallise le mécontentement des UFR

 

 

2. La formation : des retards dans l’information et l’absence d’une vision globale

 

a. Des dysfonctionnements relatifs à la diffusion de l’information sur la formation continue

 

Une partie de la circulation de cette catégorie d’informations est facilement identifiable dans la mesure où elle a pour support des documents-papier. En effet, le trajet de la brochure détaillée de formation du Service Académique de la Formation Administrative ainsi que celui du calendrier de ces formations (feuille orange) sont aisément repérables. Cependant, certains dysfonctionnements viennent perturber l’acheminement de ces documents : le constat général porte sur une transmission toujours trop tardive de ces informations ne permettant pas le respect des délais d’inscriptions, certains UFR les recevant même le jour de l’ouverture des stages. La pré-enquête ne permet pas de repérer clairement les causes de ce retard, mais certaines pistes de travail peuvent être esquissées.

 

L’envoi joint du calendrier des formations et de la feuille de paie ne semble pas systématique, et il est difficile de mesurer son impact.

Les personnels Atos-Ita citent à propos de la formation « les informations du Ministère qui sont avec la feuille de paie », mais ce document ne semble pas avoir à leurs yeux une grande importance. Les données de la pré-enquête ne suffisent pas pour évaluer la lecture effective de ces documents et ses éventuelles conséquences.

Toutefois, d’après certains responsables, un des problèmes de l’information est qu’elle n’est pas lue. Plusieurs sortes d’informations destinées aux personnels Atos-Ita (relatives à la formation, aux concours, à la vie du Siège…) sont adressées avec les feuilles de paie, six ou sept fois par an. Certains responsables pensent que ce moyen de transmission n’est pas idéal, car d’une part il peut être à la source de retards dans l’envoi des informations, et d’autre part les documents ainsi transmis ne sont pas forcément lus. Les informations importantes devraient être séparées :

« Il faudrait sélectionner les documents particuliers. Par exemple, les informations sur les possibilités d’allocation, c’est envoyé avec la feuille de paie, et moi je préférerais que les envois soient nominatifs. Il ne faudrait envoyer que des informations très générales, car il y a un risque que les personnes ne lisent pas les documents et ratent les informations » (resp. adm. Siège).

Nous retrouvons ici la question du faible impact de la communication écrite, soit parce qu’elle n’est pas assez impliquante pour le destinataire, soit parce qu’il en circule une trop grande quantité, soit parce qu’elle n’est pas pertinente à elle seule pour l’individu.

 

– Le circuit de transmission hiérarchique est long.

« La feuille de formation passe par la division du personnel puis par le Secrétaire général avant de me parvenir. Tout cela fait beaucoup d’étapes et de pertes de temps. Je reçois cela par courrier interne. (…) Le courrier interne dans le Siège, c’est à dire de division à division, met beaucoup de temps. Il y a encore des divisions où on liste tout le courrier et où on le montre au petit chef puis au chef, et si quelqu’un est absent, et bien cela va tout retarder »  (resp. adm. Siège).

« C’est en cascade, voilà pourquoi on reçoit ça trop tard. Du Siège au cinquième arrondissement, il faut déjà une semaine »  (agent).

L’hypothèse d’un circuit de diffusion très long pose problème car la seule personne qui note une amélioration de l’information sur la formation continue est justement à la tête d’un grand UFR excentré par rapport au Siège.  Ceci signifie-t-il que cette UFR représente une exception ? Ou que pour l’interviewé ‘amélioration’ ne signifie pas forcément ‘satisfaction’ ? Ou encore que la formation, très technique, ne concerne que peu de monde et est assurée par un organisme privé, sans passer par le Siège ?

Les données de la pré-enquête ne suffisent pas à éclaircir ces suppositions. L’observation précise de la circulation de la brochure détaillée éditée par le SAFA permettrait de localiser précisément les causes de retard, les hypothèses d’une accumulation de micro-retards ou/et d’un circuit de transmission hiérarchique long pouvant ainsi être vérifiées.

 

Ces problèmes de diffusion peuvent en partie expliquer le sentiment qu’ont les interviewés d’être mal renseignés : si l’information n’arrive pas au moment où les personnels en ont besoin, le sentiment de sous-information est compréhensible. Cependant, il semblerait aussi que l’information soit qualitativement insuffisante :

« (La formation), c’est le désastre ! (…) Moi, je souhaiterais courcircuiter le Siège. En plus, il y a beaucoup de mauvaise information faite par le Siège. Par exemple, le mois de janvier était (pour un stage particulier) réservé à Paris V. On ne l’a pas su et il n’y a pas eu suffisamment d’inscription à ce stage. J’ai su ça parce que j’ai eu un problème pour inscrire un de mes agents à ce stage, les dates d’inscription étaient dépassées et j’ai voulu l’inscrire à la session suivante; alors, lorsque j’ai appelé le SAFA, ils ont râlé en me disant vous n’aviez qu’à venir en janvier parce qu’ils n’ont pas eu suffisamment d’inscrits en janvier et qu’ils ont du en trouver ailleurs (pour atteindre un nombre suffisant de participants) »  (resp. adm. UFR).

 

L’insatisfaction liée aux problèmes de diffusion de cette catégorie d’information est plus ou moins importante en fonction des unités. Lorsque le nombre d’agents concernés par ces stages de formation est faible, le responsable de l’unité s’occupe personnellement de ce dossier. Il peut demander au Siège de négocier avec le SAFA un stage spécifique. Il peut aussi aller parfois jusqu’à partiellement courcircuiter le niveau intermédiaire que constitue la division du personnel du Siège en prenant directement contact avec le SAFA pour s’assurer notamment de l’enregistrement de l’inscription de leurs agents. Toutefois, la DIP et le Serétaire général doivent signer toutes les demandes de stages.

Par ailleurs, ces dysfonctionnements ne posent évidemment aucun problème à l’unité lorsque celle-ci ignore la filière SAFA et décide de confier cette formation à d’autres organismes :

« Je m’occupe de la formation continue. Je choisis les personnes et je vais jusqu’à payer des stages de formation dans le privé »  (dir. UFR).

 

En outre, les incidences de ce dysfonctionnement sont dans certains cas limitées par une connaissance personnelle acquise à travers la « pratique » du système de formation :

« (La formation), c’est le désastre; on pallie beaucoup ici par la connaissance du personnel (en place) »  (resp. adm. UFR).

Cette connaissance du système permet à un personnel en poste depuis longtemps d’anticiper et de prévenir les problèmes que peuvent rencontrer leurs collègues : ces agents « initiés » savent où et quand demander l’information indispensable pour l’inscription aux stages.

 

Les destinataires Atos-Ita de la formation constatent aussi les dysfonctionnements du système de formation continue et illustrent par de multiples exemples les conséquences des retards dans la circulation de l’information :

« Les stages sont toujours complets » (agent)

« Pour le stage de préparation au concours, j’ai reçu la convocation le lendemain de la date du stage. J’y ai été, mais j’ai raté un jour (le stage en durait trois) » (agent)

 

Face à ces dysfonctionnements, les personnels Atos-Ita ne semblent pas rester passifs, et apprennent par la pratique à mettre au point un ensemble de stratégies pour arriver à suivre les stages. Nous pouvons replacer ces différentes stratégies sur la filière chronologique d’obtention d’un stage.

Dans un premier temps, il s’agit pour l’individu de connaitre l’existence d’un stage pertinent pour lui, et pour cela l’agent anticipe et courcircuite la succession normale des procédures. L’information pertinente sur les formations étant émise pour chaque individu à des moments irréguliers dans l’année et pas forcément prévisibles, l’anticipation consiste à aller chercher l’information à la source :

« Il veut mieux téléphoner directement au SAFA » (agent)

« Mon chef d’établissement appelle le SAFA pour m’inscrire avant même d’envoyer mon dossier » (agent)

La deuxième étape consiste à remplir « correctement » le dossier, c’est à dire à comprendre, par apprentissages successifs ou par bouche à oreilles, quelles sont les informations à donner qui favoriseront la sélection du dossier :

« Il faut truquer. Si vous avez des connaissances et que vous ne voulez pas vous retrouver en initiation, il faut mettre que vous avez suivi le premier niveau, même si ce n’est pas vrai » (agent).

La troisième stratégie s’inscrit dans l’étape d’acheminement du dossier, et consiste à suivre la circulation du dossier d’inscription pour s’assurer qu’il arrive à destination :

« Le chef d’établissement doit vous signer le dossier, mais il faut bien s’assurer que c’est signé et surtout pas oublié dans un tiroir, car le chef n’ose pas dire « ‘non’ en face » (agent).

Enfin, une dernière stratégie consiste à « tenter sa chance » au moment de l’ouverture du stage :

« Il faut se pointer le premier jour du stage, parce que s’il y a une défection et que vous êtes là, ils vous prennent » (agent).

 

Les dysfonctionnements de diffusion de l’information relative à la formation continue motive parfois des pratiques particulières destinées à en limiter les conséquences. Les problèmes ne sont donc évités que par un comportement interventionniste des responsables des unités de base et par un comportement actif des agents, tout au long de la filière, comportement personnel plus ou moins facilité par leur « savoir faire » acquis par la pratique.

 

 

b. Le constat d’une absence de vision globale de la formation

 

La formation suscite une série de critiques ponctuelles, variables suivant les individus, mais qui traduit un sentiment général d’absence de projet global autour de la formation continue des personnels de l’Université. La question des critères d’attribution des stages de formation est ainsi posée à la fois par les personnes interrogées au sein des UFR et par celles du Siège. A travers cette question, l’hypothèse d’une régulation de ces critères par le biais syndical semble plausible sans toutefois pouvoir être affirmée avec certitude (les données de la pré-enquête ne le permettent pas) :

« Il y a des problèmes avec les stages de formation; les syndicats s’en mêlent. Par exemple, moi, j’ai un peintre qui saute sur tous les stages, l’anglais, l’informatique, tout ! Je n’essaie pas d’empêcher ce que je ne peux interdire. En plus, l’avis des chefs de service n’est pas toujours demandé. Ici, on a des Pic de La Mirandolle ! Ici, il n’y a pas d’évaluation après les stages et je ne sais pas ce qu’ils savent ! (…) On donne des stages d’anglais n’importe comment dans cette Université. Ma secrétaire en a eu mais elle ne sait même pas parler français ! Et on en donne à des gens qui ne l’utiliseront jamais. Qu’est ce qu’il va faire de l’anglais, mon peintre ! » (dir. UFR).

Les remarques relatives à l’absence, ou plus exactement à l’opacité des critères d’attribution des stages se doublent d’un constat de carence en terme de « gestion » de la formation continue. Les interviewés regrettent qu’il n’y ait pas de prise en compte effective de la formation dans une sorte de plan de carrière des personnels, c’est-à-dire de réelle réflexion autour des objectifs non seulement de formation mais aussi d’évolution des carrières :

« J’ai l’intention de faire mon enquête pour savoir qui a fait quoi, qui a le projet de faire quoi, pour mettre des priorités et que tout le monde bénéficie de stages » (resp. adm. UFR).

« Il y a une amertume des gens. Mais les former pour aller où et faire quoi ! Il y a beaucoup de compétences gâchées » (resp. adm. UFR).

« Ici, les stages ne concernent que quelques personnes; je débloque (les situations) avec les gens concernés moi-même » (resp. adm. Siège).

 

De même, le problème posé par l’absence des personnels au moment des sessions de formation s’inscrit dans cet ensemble de questions auxquelles aucune réponse claire et officielle n’est donnée.

 

Si les UFR restent les unités les plus sensibles aux problèmes de diffusion de l’information sur la formation, le problème d’une gestion à trop court terme de la formation et de l’absence d’une politique transparente pour tous les niveaux hiérarchiques est souligné tant par les UFR que les services du Siège.

 

 

3. Les concours : une externalisation des responsabilités sur l’agent

 

Les concours (épreuves écrites ou sur dossier suivant le statut des personnes) sont une des procédures fondamentales qui organisent les carrières de l’administration, puisqu’ils sont pour une grande part à la base de l’avancement.

 

Nous pouvons repérer deux étapes clés dans la circulation de l’information relative aux concours : la première est celle de  l’accès à l’information sur la tenue des différents concours, et la deuxième est celle de l’inscription (retrait, rédaction et dépôt du dossier).

 

Pour la première étape, les modes d’acheminement des informations sur les concours sont multiples, d’après les témoignages des destinataires Atos-Ita :

« On est averti par brochures »

« Chez nous, c’est par note de service »

« Il me semble en avoir par fiche de paie »

« Je trie les documents au labo et je dispatche en fonction des gens susceptibles d’être intéressés, et je mets ‘pour information' »

Le service du personnel de l’unité ou le chef de service peut également informer la personne par oral, ce qui permet aux personnels de ne pas rater les dates d’inscription aux différents concours.

Mais il arrive aussi que ce soit la personne concernée elle-même qui aille chercher l’information :

« Au départ, il a fallu téléphoner au Ministère pour s’informer, puis on a appris que c’était au Rectorat » (agent).

 

Selon la DIP, les informations sur les concours passent plus ou moins bien selon les UFR, et il est nécessaire, vu l’importance de ce type d’information, que les documents soient nominatifs, spécifiquement dans les UFR éclatés où un affichage n’est pas suffisant eu égard à la dispersion du personnel.

 

L’information sur les concours ne suscite pas de commentaires de la part des responsables administratifs des unités sur d’éventuels problèmes de transmission. Les avis qui arrivent à l’unité en provenance du Ministère ou du Rectorat sont généralement et dans un premier temps affichés. Certains services couplent ce mode d’information avec une information directe, orale ou par courrier en fonction des effectifs et de l’éclatement géographique des personnels. Dans ce cas, il s’agit d’attirer l’attention des personnels susceptibles d’être intéressés et de déclencher un processus d’auto-information.

Il semble en fait que les responsables ne pâtissent pas ou peu des dysfonctionnements éventuels de ce circuit d’information et que le coût des carences soit reporté sur les personnes directement concernées par ce type d’information. En effet, de l’avis du personnel Atos-Ita, l’information sur les concours n’est pas toujours suffisamment complète, et n’arrive pas toujours à temps :

« On nous avertit au moment des concours, mais c’est parfois trop tard. La dernière fois, ils ont envoyé l’information en juillet/août, mais tout le monde était en vacances (et les dossiers étaient à remettre fin août) »  (agent).

« Quelquefois on a le contenu du concours, mais on a quasiment jamais des informations pour savoir comment le préparer. Il faut les acheter ! » (agent).

 

Au sujet de l’information sur les concours, il semble que les réunions organisées par la division du personnel pour présenter le nouveau statut des concours soient remarquées et attendues, puisque beaucoup d’interviewés en parlent spontanément, tant parmi les responsables que parmi les Atos-Ita :

« Pour le printemps, on va avoir beaucoup plus d’informations. On est tous à l’affût » (agent).

« On a eu une réunion pour les Atos-Ita, il y a quelques semaines. La responsable de la DIP est venue. C’est la première réunion en quinze ans ! » (agent).

« Oui, elle passe dans les facs, elle va venir chez nous, il paraît ».

« La responsable de la DIP s’est déplacée pour présenter le nouveau statut, et j’ai été étonnée, parce que le personnel est venu en nombre convenable » (resp. adm. UFR).

 

Pour la seconde étape, relative à l’inscription aux concours, les Atos-Ita sont plus ou moins laissés à eux-mêmes. Il arrive que le service du personnel ou un chef de service transmette le dossier à la personne concernée :

« C’est une personne de l’UFR qui nous les distribue » (agent)

« Notre chef de service arrive à nous les faire descendre » (agent)

mais dans la plupart des cas, la prise en charge de l’inscription est directement confiée aux intéressés et l’agent se procure le dossier par lui-même :

« C’est à nous d’aller le chercher, à partir des informations données par la brochure » (agent).

« on va les chercher au service du personnel au Siège » (agent).

« Moi je vais au Rectorat » (agent).

« Cette année, on a été avertis très tôt. On peut retirer les dossier le 10 février, et jusqu’au 6 mars. Avant, on n’avait qu’une semaine. Dans ce cas, je me déplaçais moi-même et pour mes collègues. J’allais chercher les dossiers à Arcueil, et on les renvoyait très vite » (agent).

 

Il semble que la décharge des procédures d’inscription aux concours sur la personne concernée soit tout à fait délibérée de la part des responsables des unités. Elle répond à un souci d’éviter d’éventuelles contestations en cas de problèmes dans le processus d’inscription :

« Je signe le dossier, et on le rend à l’agent qui va lui-même le déposer au Siège ou au Rectorat. On demande à l’intéressé de prendre en charge son dossier, c’est lui qui en est responsable » (resp. adm. UFR).

 

Cette prise en charge personnelle de l’inscription ne semble pas être réellement source de difficultés, car les agents anticipent et pallient aux problèmes éventuels de manque ou de retard d’informations en les recherchant eux-mêmes. L’anticipation est d’autant plus facile qu’une sorte de calendrier des procédures administratives incontournables pour passer un concours est intériorisé par les individus. Ces procédures ne variant pas sur la forme et respectant tous les ans à peu près le même calendrier, une sorte de « culture » autour des concours circule entre les individus : par exemple, il semblerait que le mois de mars soit repéré comme le mois de la clôture des inscriptions.

 

Néanmoins, la circulation de l’information sur les concours semble une question plus délicate qu’il n’y parait au premier abord, si nous considérons l’attention qu’y portent les différents services.

La division du personnel semble réellement soucieuse de voir cette information circuler, comme le soulignent ces témoignages :

« Les concours, c’est important car maintenant, pour avancer, il n’y a que le concours; et il faut faire de l’information, de la propagande voire même de l’intox. Là, on a édité beaucoup de documents, et des réunions ont été organisées. La première fois, ça s’est fait à la demande des syndicats. (…) Les concours, c’est une des grosses masses d’information qu’on gère » (resp. adm. Siège).

« Théoriquement, au niveau hiérarchique, on ne connait que le Directeur d’UFR. Si on veut que ça (l’information sur les concours) arrive, (…) il faut l’envoyer aux chefs de division et aux chefs de service » (resp. adm. Siège).

 

La mise en place des réunions d’informations sur le nouveau statut des concours confirme l’attention et les efforts que la division du personnel porte à ce thème. En effet, c’est semble-t-il le seul sujet qui ait donné lieu à ce jour à une information directe du personnel par le biais de réunions sur les sites.

 

Ces actions sont peut-être issues d’une volonté légitime d’informer, mais nous pouvons aussi y voir le résultat d’une éventuelle pression syndicale. Tout ce passe comme si chacun voulait se protéger d’une menace de contestation, aussi bien par la diffusion d’une information générale au niveau des services centraux que par l’externalisation des responsabilités sur l’agent au niveau des unités.

 

 

4. Les mutations : un terrain de pression syndicale ?

 

La circulation de l’information relative aux mutations parait relativement simple. La facilité d’accès au dossier de mutation pour le personnel Atos-Ita découle essentiellement de sa régularité. Un dossier circule tous les ans, en février/mars, ce qui permet à la personne concernée d’être vigilante.

En revanche, les problèmes se concentrent sur les résultats de la procédure, qui sont perçus comme étant assez aléatoires.

Une personne Atos-Ita cite comme élément d’aléa l’appréciation des justifications de la demande lorsque celle-ci s’appuie sur des compétences techniques  :

« Dans les commissions paritaires, il n’y a pas de représentants du personnel technique, et ils jugent des dossiers techniques ».

Toutefois, les procédures de mutations externes semblent moins aléatoires que pour les mutations internes :

« Quand c’est en externe, c’est ministériel, c’est par commissions mais elles ne peuvent pas trop bloquer ».

En revanche, dans les cas de mutation interne, si la procédure est peut-être plus simple (une mutation au sein d’un UFR ne remonte pas jusqu’au Siège), les pouvoirs des personnes sont plus sensibles :

« Si c’est une mutation en interne, quand un chef de service ne veut pas il peut bloquer votre dossier ».

 

Au sujet des mutations s’exprime donc une tension que nous rencontrons à propos d’autres thèmes au sein de l’Université, notamment à propos de la gestion des conventions de recherche. Cette tension s’opère entre deux volontés contradictoires, qui revêtent chacune des intérêts spécifiques : le souhait d’une gestion directe d’une part, qui évite démarches et « lenteur bureaucratique » dues aux multiples échelons, et le souhait d’être gérés par des organes neutres et indépendants des relations quotidiennes de travail d’autre part, qui permettent de neutraliser en partie l’influence des rapports de pouvoirs.

 

Les personnels Atos-Ita sont informés des résultats des mutations en premier lieu par la voie syndicale, même s’ils ne sont pas syndiqués.

La voie syndicale représente semble-t-il un important circuit parallèle d’informations. D’après un responsable du Siège, les informations transmises par ce circuit sont nombreuses et influentes :

« Les documents concernant des Atos-Ita sont envoyés aux élus syndicaux. C’est  important de communiquer avec les responsables du personnel, car les syndicats répercutent beaucoup » (resp. adm. Siège).

 

Vu du côté des Atos-Ita, la qualité et la pertinence de l’information par voie syndicale semble très variable selon les personnes.

Certains Atos-Ita ne recoivent pas d’information syndicale (« là aussi, on est mal informé, en Sorbonne on n’a rien du tout »), et d’autres reçoivent une information sans y porter attention :

« Je ne peux pas dire. Je ne lis pas les documents que je reçois, car ça ne m’intéresse pas du tout, même si je suis syndiqué et que je vote ».

Enfin, certains Atos-Ita disent être informés par la voie syndicale. Nous pouvons remarquer que les personnes qui affirment cela sont celles qui ont une pratique syndicale active. Ceci tend donc à confirmer que l’information par bulletins écrits n’est pas suffisante, et que l’information pertinente et stratégique est celle qui passe par les canaux oraux et personnalisés. Les réunions syndicales, comme les réunions des Bureaux, sont stratégiques pour l’individu non pas forcément pour l’information « officielle » qui y circule, mais davantage parce qu’elles sont l’occasion d’un apprentissage des règles de fonctionnement non dites de l’organisation et l’occasion de construire un réseau personnel de relations informelles.

 

 

5. L‘information sur les salaires : un sentiment d’incompréhension face aux procédures

 

Les personnels Atos-Ita disent être informés des augmentations de salaires au niveau national, par la radio. Concernant la fiche de paie, ils apprécient le fait qu’elle soit détaillée, et trouvent important de savoir comment les sommes sont réparties. Mais cette meilleure information sur l’affectation des cotisations, si elle représente un progrès, ne suffit pas à dissiper la méfiance éventuelle (« en même temps que les augmentations, on aprend souvent qu’on va nous retirer des choses »), et surtout le sentiment d’incompréhension face aux mouvements qui affectent les salaires. Les Atos-Ita expriment par de multiples exemples leur sentiment que les procédures sont illogiques et obscures :

« Quand on est titularisé, on gagne moins d’argent qu’avant » (agent).

« J’ai eu une prime d’installation, qu’on m’a retiré par le biais de rachats de points de retraite » (agent).

« On vous donne une prime d’installation, comme quoi vous êtes titulaires, mais cette prime, après, elle s’en va pour racheter les points » (agent).

 

Nous retrouvons ici un problème général touchant la circulation de l’information. Les personnes ne semblent pas suffisamment informées du « pourquoi » des choses qui les concernent, ces « choses » pouvant être aussi bien le mouvement de salaire d’un Atos-Ita que le report d’une réunion du Bureau pour un Vice-Président ou la demande d’un compte rendu de mission pour un chercheur. Nous avons l’impression, à écouter les interviewés, que les directives circulent toujours du haut vers le bas, sans que la réalité du « bas », ses préoccupations, ses souhaits ou ses contraintes ne soient pris en compte. Il semble que le Siège apparaisse comme initiateur, sans que les destinataires comprennent toujours l’objet ou le bien fondé de l’action. Cette référence à une « instance supérieure », plus ou moins définie, au comportement opaque, renforce une attitude passive, voire fataliste des membres de l’organisation, et interdit finalement la naissance d’un sentiment d’appartenance à une entité commune.

 

 

6. L‘information culturelle

 

Les autres informations destinées au personnel sont relatives au domaine « culturel », spectacles, concerts, voyages. Les brochures sont adressées par le Ministère aux responsables des services administratifs, qui le plus souvent les affichent.

Les personnels Atos-Ita se disent plus ou moins bien informés sur ce sujet. Certains sont au courant des manifestations, et d’autres non. Ils pensent que dans certaines UFR, les informations restent bloquées au service du personnel. Il peut arriver aussi que le lieu de travail de l’agent soit excentré et rende difficile la recherche d’information :

« Au service du personnel, ils affichent. Mais je ne peux pas aller à l’UFR Cochin, je travaille à Ste Anne » (agent).

 

L’information du Ministère ne parvient donc pas systématiquement aux destinataires. Mais surtout, nous pouvons remarquer que lorsqu’elle leur parvient, cela ne signife pas que la personne va pouvoir bénéficier du service proposé. En ce qui concerne les spectacles par exemple, des agents se plaignent de ne jamais pouvoir obtenir les places à tarif réduit proposées :

« J’ai essayé, c’est toujours trop tard, c’est toujours complet ».

« Je téléphone, mais c’est tout le temps occupé »

« Il faut téléphoner trois semaines avant (la date du spectacle), mais c’est quand même toujours trop tard, il faudrait appeler bien avant »

Il semble donc que l’information qui arrive à l’agent par la voie hiérarchique traditionnelle, sur support brochures ou affiches, ne soit pas pertinente pour qu’il puisse profiter des propositions. Là encore, il faut qu’il apprenne, par la pratique, à repérer les acteurs et les régles du jeu du processus d’attribution des avantages. Par exemple, il faudra qu’il repère dans quel service et quelle personne appeler pour obtenir l’information sur les différents services proposés, afin d’anticiper son inscription.

 

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE III

 

 

 

PROCESSUS DE DECISION

 

ET SOURCES D’INFORMATIONS

STRATEGIQUES

 

 

 

PREMIERE TENTATIVE D’ANALYSE DU FONCTIONNEMENT DU PROCESSUS DE DECISION ET REPERAGE DE SOURCES D’INFORMATION STRATEGIQUES

 

 

L’analyse de la circulation de l’information permet non seulement de reconstituer les circuits tels qu’ils existent concrètement en repérant les différents intervenants, les problèmes, les dysfonctionnements, mais aussi d’identifier des sources et des moments privilégiés d’information. Au sein de l’Université, ces moments correspondent à diverses réunions : d’une part les réunions entre responsables administratifs et d’autre part celles des différents Conseils, Bureaux et Comités tels le Comité de coordination des Etudes Médicales et Odontologiques (CEMO) ou le Comité de coordination des UFR de sciences humaines. Si ces moments constituent des sources privilégiées d’information, ils ne correspondent cependant pas aux moments décisifs du processus de prise de décision : l’essentiel de ce processus se fait ailleurs, à travers des réseaux personnels, parallèles au circuit prévu institutionnellement.

 

 

I. LES REUNIONS, DES LIEUX STRATEGIQUES D’INFORMATION

 

 

A. les réunions, une source d’information

 

Responsables administratifs et directeurs d’UFR soulignent l’importance des réunions auxquelles ils assistent. Pour les responsables administratifs, c’est un lieu d’échanges d’information que tous apprécient :

« Les réunions entre chefs de service du siège et responsables administratifs sont bien. C’est une occasion de sentir la réalité de l’Université. Ces réunions sont indispensables, sinon, on est relégué au fond de son UFR. C’est l’équivalent, pour nous, du Bureau élargi. »  (resp. adm. UFR)

L’ensemble des directeurs d’UFR souligne que les réunions des Conseils et des Bureaux sont essentielles dans leur réseau d’information relatif à l’Université et ceux n’y ayant pas accès s’estiment moins bien informés que leurs collègues :

« Les réunions, c’est une bonne source de nouvelles et ça permet d’être informé; par exemple, pour des prévisions pas tout à fait officielles, des problèmes financiers, les orientations du ministère de l’Enseignement. » (dir. UFR).

 

Les réunions du CA et du Bureau occupent une place particulièrement importante dans le discours de ces interviewés, rejoints à ce propos par leurs responsables administratifs. En effet, ces derniers s’efforcent d’obtenir les informations échangées lors de ces réunions, mais tous n’y ont pas accès de façon similaire. Les Directeurs d’UFR sont bien évidemment un premier média d’information : la grande majorité d’entre eux déclare informer leur responsable administratif à leur retour de réunions. Il s’agit d’une information verbale, informelle, qui est plus ou moins exhaustive et plus ou moins immédiate en fonction notamment des diverses charges du Directeur, de sa perception de l’importance de ce qu’il a pu entendre et de ses rapports avec son subordonné.

« J’ai des relations téléphoniques avec le Secrétariat général pour savoir ce qui s’est passé dans le Bureau ou ce qui se passe dans les différents Conseils. (…) Je peux obtenir certaines informations par le Directeur de l’UFR (présent au Bureau), mais je ne le vois pas forcément. (…) Par exemple, le Bureau a voté une dotation aux crédits de maintenance. Dans le cadre du plan quadriennal, les UFR doivent envoyer un devis de travaux pour les 4 ans à venir. Il faut classer toute une série de travaux, mais nulle part, il n’y a pas de papier disant que vous devez mettre les travaux par année. Cette information s’est donnée au Bureau et, si je ne l’avais pas eu par le Directeur de l’UFR, je ne sais pas ce qui se serait passé … Le siège aurait probablement tranché pour moi comme d’habitude » (resp. adm. UFR).

« Moi, je suis privilégié : mon Doyen est au Bureau du CA. Comment ce qui se dit au Bureau est répercuté dans les UFR qui n’ont pas de représentant direct, ça, je ne le sais pas ! » (resp. adm. UFR).

L’attention portée par les responsables administratifs aux procès verbaux de ces réunions peut aussi constituer un indicateur de l’importance qui leur est accordée :

« Il est nécessaire d’être au courant rapidement, or les PV arrivent souvent trois semaines ou un mois après la réunion. J’aimerais avoir des synthèses de ce qui s’est passé, une ou deux pages, quelques lignes pour savoir les choses importantes, sans attendre le PV qui arrive trop tard. » (resp. adm. UFR).

 

L’accés à cette source d’information particulière que constituent les réunions du CA et surtout de son Bureau est donc variable en fonction des individus et de leur réseaux personnels d’information : l’information diffusée par le canal formel (les PV) reste insuffisante et surtout inopérante car trop tardive ; celle, informelle, transitant par les directeurs d’UFR intéresse certes les responsables administratifs mais connait certaines limites : elle n’est pas dans tous les cas satisfaisante. De ce fait, certains interviewés ressentent le besoin de compléter cette information en mobilisant des ressources personnelles nécessitant un réseau pertinent de relations au niveau du siège. L’accès à l’information est donc, en ce qui concerne les responsables des UFR, un accès inégal, favorisant les directeurs d’UFR.

« Moi, je suis assez au fait de tout ce qui se passe; mes services le sont probablement moins, mais (c’est normal) au niveau des Bureaux, on a plus de relations »  (dir. UFR).

 

 

B. les réunions, des lieux d’apprentissage des relations de pouvoir et d’élaboration des jeux stratégiques des acteurs

 

Les personnes interviewées n’explicitent pas précisemment les types d’informations qui s’échangent en réunion et la raison de l’intérêt qu’ils y portent. Il semble qu’une des « informations » propre à ces réunions soit plutôt de l’ordre d’un apprentissage, d’une perception des jeux relationnels existants, d’une appréciation des rapports de force puis, par conséquent, de la marge de liberté c’est à dire du « possible » et des limites de l’action de chacun sur le système de décision.

 

 

1 L‘évaluation des rapports de force

 

Les réunions semblent permettre aux uns et autres de prendre conscience du poids relatif de leur UFR au sein de l’ensemble organisé que constitue l’Université. La présence à ces réunions est déjà un premier indicateur sensible des atouts de chaque unité, cette présence étant d’ores et déjà le résultat d’un premier rapport de force :

« Il y a une véritable épreuve de force avant les élections pour le Conseil d’administration et, j’ai fait ce qu’il fallait pour y être. » (dir.  UFR).

La « pratique » de ces réunions permet alors d’évaluer, par une sorte de processus basé sur l’observation et un mécanisme d’essais-erreurs, la position de chaque UFR au sein d’un rapport de force centré sur l’allocation des ressources :

« Tout le monde au Bureau a, dans sa tête, une espèce de prorata du poids relatif des différentes disciplines : 1/2, voire 66% pour le médical, 1/4 pour le droit, 1/4 pour les sciences humaines. Ainsi, vous avez une métrique dans la tête, vous savez l’espace qu’il vous reste et ce que vous pouvez demander. Tout l’art, c’est de dépasser cet espace, mais pas trop afin que ce soit accepté. A l’intérieur du Bureau, on dit ce qu’on a envie de dire, mais il faut rester raisonnable sinon, c’est la levée de boucliers ! » (dir. UFR).

 

Cette appréciation des atouts des différentes UFR, qui permet une sorte de positionnement « stratégique » des uns et des autres, est une phase d’autant plus importante que les individus sont confrontés à une pénurie de moyens. De fait, il y a rivalité entre UFR puisque leurs attentes ne peuvent être toutes satisfaites :

« On ne peut pas dire qu’il y ait vraiment la guerre, mais ce n’est pas terrible. » (dir. UFR).

« Les rapports entre nous et les autres UFR se sont un peu améliorés depuis qu’il y a eu une augmentation des sommes allouées aux budgets pédagogiques et aux heures complémentaires. On s’entend mieux depuis qu’on ne s’étripe pas pour savoir qui ne va pas payer ses profs. Quand il y a pénurie, c’est la horde sauvage et la bagarre. Le rapport de force est d’autant plus aiguë qu’il n’y a pas d’argent. » (dir. UFR)

 

Cette catégorie d’informations plus ou moins diffuses recoupe des éléments propres à la structure de la société dans son ensemble, qui, s’il n’y a pas lieu de les examiner en détail, doivent malgré tout être pris en compte comme structurant le système d’action concret dans lequel s’insèrent les membres de l’Université :

« Et les juristes, ça va pas mal avec les médecins ! Les juristes, ils sont riches, comme les profs de médecine ; ils ont un double traitement, et les médecins ont moins d’heures de cours. Il y a une connivence de classe entre juristes et médecins. »

Il apparait ainsi que chacun hiérarchise les priorités en fonction de critères particuliers tels que la finalité des études ou encore l’appréciation de la qualité des contenus pédagogiques :

« Les psychos, ils ont un raisonnement de débiles ! Quand on les voit demander douze postes et que l’on sait qu’à la fin de la maîtrise ils vont à l’ANPE ! (…) Il y a les délirants, les psychos, et après ça va mieux ! »  (dir. UFR).

« On ne fait pas le même produit. C’est vrai ; on ne peut pas se battre entre boulangers et marchands de légumes… et encore, on peut avoir des disputes sur la qualité de nos produits respectifs » (dir. UFR).

 

Par ailleurs, des représentations spontanées très fortes existent dans l’esprit des interviewés. Des groupes sont identifiés par les participants aux réunions. Ces groupes s’organisent à partir d’éléments de différenciation qui semblent être, dans un premier temps, l’appartenance ou non à l’univers médical.

« Les médecins, ils sont toujours d’accord contre les autres ! » (dir. UFR).

« Les doyens de médecine se foutent des autres UFR ! » (dir. UFR).« Les médecins n’ont plus peut-être l’exclusivité ; on (les UFR non médiales) est mieux traité (…) mais, maintenant, les médecins n’osent plus dire que les sciences humaines n’existent plus, même s’ils se foutent des petites UFR. » (dir. UFR).

Cette première distinction est nuancée, affinée, chez certains interviewés :

« Les odontologistes font rire les médecins ; la médecine, c’est la noblesse ! Le Directeur de l’UFR dit qu’au Bureau, c’est les médecins qui parlent. Même en Bureau, c’est la médecine qui parle et qui gouverne ! » (resp. adm. UFR).

« Les petites UFR, on se demande pourquoi elles veulent continuer à exister ! » (dir. UFR).

 

Ces groupes ont donc des contours plus ou moins fixes : des UFR peuvent avoir, en fonction des sujets, des stratégies d’alliance différentes qui pourraient être appréhendées à travers une analyse plus approfondie. Une étude des systèmes d’alliance permettraient d’identifier les éléments susceptibles d’être mobilisés pour soutenir une politique de changement.

 

 

2. Les réunions, la possibilité de contacts personnels directs

 

Dans l’univers relativement cloisonné et anonyme (circulation de l’information essentiellement hiérarchique et impersonnelle) que constitue l’Université, les réunions permettent aux uns et aux autres de se rencontrer. Certes, l’établissement de ce contact personnel répond au besoin de reconnaissance sociale qui a précédemment été observé mais il répond aussi à un besoin plus « stratégique » : la nécessité de repérer des alliés potentiels, d’avoir des sources complémentaires d’informations, de connaître son interlocuteur au cas où une négociation devrait avoir lieu avec lui, de se doter d’un maximum d’atouts pour participer aux « jeux » susceptibles d’influer dans le processus décisionnel :

« Je fais partie du Bureau de l’Université (…) c’est souvent artificiel mais on sait où se trouver au cas où. » (dir. UFR)

« Etre au Bureau, ça me permet de connaître du monde et ça me permet de créer des relations personnellles mais pas de m’exprimer publiquement. » (dir. UFR).

De même, à une échelle différente, les réunions entre responsables administratifs semblent répondre aux mêmes soucis.

« Je vois les responsables administratifs des autres UFR en réunion et on déjeune alors ensemble. Je peux donc les appeler car je les connais «   (resp. adm. UFR)

« (au sujet des réunions destinées aux questions d’avancement) : Là on se bat; la hiérarchie des disciplines est présente dans nos têtes. (…) là, on ressent les différences entre les sciences et les sciences humaines. » (resp. adm. UFR)

 

 

II. UN PROCESSUS DE PRISE

DE DECISION INEGAL

 

 

A. les réunions, des « chambres d’enre-gistrement » ?

 

Si les réunions sont des lieux privilégiés d’information, elles ne semblent pas être au coeur des processus de décisions « vitales » pour les UFR, les décisions relatives à l’allocation des ressources indispensables au fonctionnement des UFR (budgets, locaux, personnels) ne sont apparemment pas arbitrées au cours de ces réunions :

« Au Conseil d’administration, on fait beaucoup de figuration car on entend plutôt parler de Diplômes Universitaires de médecine, mais on doit y être pour notre UFR. » (dir. UFR).

« Le Bureau prend des décisions sans qu’on comprenne toujours pourquoi, et le CA est une chambre d’enregistrement. On nous distribue des papiers à l’entrée et on nous dit ‘il faut avoir voté cela dans le quart d’heure’. Dans notre CA, il n’y a pas d’opposition et personne n’ose parler. Même si quelqu’un prend la parole (conteste les décisions du Bureau présentées par le Président), on a l’impression de monter seul au créneau et, comme on ne veut pas en faire une affaire personnelle, on laisse tomber. » (dir. UFR).

 

De façon quelque peu similaire, les responsables administratifs mettent l’accent sur le caractère descendant de l’information échangée au cours des réunions auxquelles ils sont conviés : leur participation aux processus de décision semble de toutes façons tout à fait limitée, ce qui accentue par ailleurs l’importance de ce qui se passe au niveau de leurs supérieurs hiérarchiques :

« On a des réunions entre chefs de services, pour nous. Là, on balaie très large et on ne descend pas au niveau des problèmes concrets des services. (…) Il ne faut pas de réunions formelles, avec le Président, car là aucun problème concret n’est abordé. » (resp. adm. UFR)

L’intérêt relatif de ces réunions en terme de prise de décision est notamment confirmé par l’agacement, voire la colère, de certains directeurs d’UFR lorsque ce sujet est abordé ; ils attestent parfois d’une « overdose » de réunions à l’importance toute relative au vu des impératifs de fonctionnement de leur UFR :

« Chaque doyen participe à trois commissions ; il a en plus les Conseils de l’université, puis les trajets à faire pour s’y rendre, les réunions aux Rectorats, celles où on remplace le Président et enfin les comptes rendus quand il doit en faire. Moi, je deviens enragé à cause des réunions et du travail de compte rendu ! » (dir. UFR).

Globalement, les réunions semblent plus correspondre à des lieux où les décisions sont formellement arrêtées, officialisées, qu’élaborées, même si les réunions du Bureau apparaissent aux yeux des interviewés plus « importantes » de ce point de vue que celle du CA. Parallèlement à ces instances, tout un système de relations, formel ou informel, existe et vient influer sur ce qui se passe en Bureau.

 

 

B. un processus de décision parallèle au système institutionnel

 

Lorsque les directeurs d’UFR exposent la façon qu’ils utilisent pour régler les problèmes de leur unité, il apparait que le mode de résolution des problèmes et, de ce fait, le processus de décision passent par un ensemble de négociations qui ont lieu en dehors du système institutionnel : c’est par le biais de relations de face-à-face qu’ils influent sur les décisions qui les concernent directement. Une sorte de travail de négociation, plus ou moins individuel, se fait auprès des centres de décision pertinent pour eux :

« Généralement, je profite des réunions du Bureau (pour mes problèmes) et je ne les (le Siège) dérange pas inutilement. » (dir. UFR)

« Je vais au siège pour les réunions et quand j’ai besoin de quelque chose. Le siège communique surtout par convocations et réunions donc je vais aux réunions auxquelles le siège m’invite. Il y a des points pour lesquels on ne peut éviter de se déplacer et si on n’y va pas, on n’a rien. » (dir. UFR)

« Quand j’ai un problème, je vais voir le Président et on règle les problèmes sans passer par le CA. Ca fait un moment que j’ai appris à ne pas utiliser les niveaux inférieurs. (…) Mais, ce n’est pas normal de gérer notre budget en fonction de nos relations avec le Président. » (dir. UFR).

« Quand on veut quelque chose, il faut prendre rendez-vous avec le Secrétaire général, ou sinon, on attend pendant des années. Les relations personnelles sont très importantes donc on doit toujours être sur la brèche alors que ça devrait fonctionner normalement. » (dir. UFR).

Ce système peut parfois bénéficier d’une convergence d’intérêt entre plusieurs UFR et donner lieu à des alliances :

« Il faut mettre à part les trois CHU, les trois vraies facultés; là, ils se mettent d’accord très souplement. La discussion se fait à part. » (dir. UFR).

 

Conclusion

 

* L’accès au pouvoir décisionnel, un atout inégalement réparti

Confrontées à un fonctionnement organisationnel particulier, les UFR ne bénéficient pas des mêmes ressources. La présence au sein du Conseil d’administration et, mieux encore, du Bureau, semble constituer un atout essentiel que toutes ne possèdent pas. Cela semble étroitement lié aux possiblités d’accès aux centres de décision, centres que les individus doivent à la fois bien identifier (il varie en fonction des dossiers), et auxquels il faut ensuite avoir accès.

« On peut mettre au point tous les systèmes de communication que l’on veut, il faut quand même pouvoir garder des contacts personnels et pouvoir discuter de nos problèmes. » (resp. adm. UFR).

 

* L’accès direct aux centres de décision, une nécessité organisationnelle

Le fonctionnement réel de l’Université se base sur l’accès direct aux centres décisionnels. Cela semble se vérifier pour tous les niveaux hiérarchiques. De ce fait, toute tentative de faire coincider le fonctionnement effectif de l’organisation et le respect strict des structures formelles parait vaine, à la limite contradictoire : on ne peut obliger les individus à respecter le système hiérarchique et les responsabilités théoriques de chaque niveau en ignorant la réalité que constitue le système organisationnel tel qu’il existe concrètement.

 

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE IV

 

 

 

LES ENJEUX EN TERME

 

D’IMAGE COMMUNE

 

 

 

 

A travers la réunion de groupe et les entretiens, un ensemble d’images et d’opinions relatives à l’Université et ses appellations ont été recueillies. Les évocations spontanées, les pratiques et les opinions des individus sont en cohérence, les unes faisant échos aux autres.

 

 

 

I. LA PERCEPTION DES ATOS-ITA

RELATIVE A L’UNIVERSITE

 

 

Au cours de la réunion de groupe avec les personnels Atos-Ita, nous les avons fait réagir, par des techniques projectives basées sur des jeux imaginaires, sur les images spontanées que leur évoquent l’Université René Descartes et ses composantes (l’instance du Siège et l’unité respective de travail des participants).

Ces images, obtenues par associations projectives, semblent en cohérence avec les pratiques et les opinions qu’eux-mêmes et les autres personnes interviewées au sein de l’université ont exprimées.

 

A. L’image de l’Université René Descartes

 

1. L‘image d’un éclatement et d’une fragilité

 

L’absence de relations entre les UFR et la difficulté à communiquer avec le Siège, sentiments maintes fois exprimés à propos de situations concrètes, se retrouvent dans les figures plus imaginaires telle que la métaphore de la « marguerite ». Cette association porte sur le fait que l’on peut facilement distinguer un centre (le coeur de la fleur = le Siège) de son pourtour, composé lui-même d’une multitude d’unités relativement autonomes (les pétales de la fleur = les UFR). L’image de la marguerite exprime également l’idée d’éclatement (les pétales sont éclatés autour du coeur) et de fragilité.  En effet, les pétales peuvent de détacher facilement :

« Nous, on est les pétales perdus. Ils nous soufflent dessus et nous on tombe » (agent).

Enfin, la marguerite, par l’idée d’effeuillage à laquelle elle renvoie, évoque la multiplicité et l’ambivalence des sentiments que l’on peut ressentir à l’égard de l’Université René Descartes : « un peu, beaucoup, à la folie, pas du tout ».

 

 

2. Une image extérieure luxueuse en décalage avec la réalité de l’intérieur

 

L’université René Descartes évoque le classicisme luxueux et élégant. Les images supports de cette évocation sont la « rose » pour la beauté, la « Mercédès » pour le poids et la visibilité sociale, et la « Jaguar » pour le prestige. L’université René Descartes, ce sont  :

« Les grandes études, les grosses têtes, l’élite, les gens qui ont la possibilité d’y aller (…). La richesse, les grands salons » (agent).

Mais ce luxe et ce prestige sont en décalage avec la réalité interne des conditions de travail, marquée par la pénurie et la « douleur ». Nous retrouvons dans la métaphore de la rose l’idée de méfiance face à une réalité trop belle en apparence :

« La rose, c’est beau mais ça pique. Si on ne fait pas attention, on se pique » (agent).

Cette apparence de luxe et de beauté ne tient pas devant la réalité, marquée plutôt par la déliquescence :

« C’est plutôt une rose fanée, une rose qui perd ses pétales ! » (agent).

 

 

3. L‘image d’une structure lourde et difficile à faire avancer

 

L’impression de lenteur administrative, le caractère hiérarchique de la structure, la sensation d’incompréhension qui entoure certaines procédures, sentiments souvent énoncés par les interviewés, s’expriment à nouveau dans les images qu’évoquent l’Université René Descartes. Ainsi, les associations à un véhicule, la « 2 CV », ou  à une musique, un « slow » sont des figures qui expriment lenteur et  difficulté à se déplacer :

« Avec une 2 CV, même quand on accélère, on ne peut pas, ça n’avance pas » (agent)

« Pour bouger, ça prend du temps. Le consensus est long à trouver, on s’endort » (agent).

 

L’intérieur de cette structure peut être totalement statique dans les représentations de certaines personnes, être « quelque chose d’énorme et de figé », et il se peut qu’il n’y ait rien à récupérer. Ainsi, l’Université René Descartes est associée à une « charette », dans la mesure où elle sert :

« à transporter tout ce qui ne sert à rien, pour tout ce qui est au rebus » (agent).

Mais, pour d’autres agents, même si la structure est lourde, elle n’interdit pas une tentative de mouvement à l’intérieur. L’Université est par exemple associée à une voiture « Renault Espace », car :

« C’est un véhicule grand, et à l’intérieur il peut être transformé. C’est un grand machin, et dedans on essaie de faire bouger » (agent).

 

 

B. L’IMAGE DU SIEGE

 

Nous pouvons regrouper les images évoquées par le Siège autour de deux thèmes, celui du classicisme froid et austère, et celui de l’immobilité.

Le Siège exprime la beauté, les matériaux nobles (pierre, bois), les tableaux et les habits classiques. Ce traditionnalisme est un peu vieillot :

« ça sent l’encaustique et la poussière, les gens sont habillés en gris et l’ambiance est froide et austère » (agent).

Ce classicisme, s’il est imposant, confine parfois dans les représentations des individus, à de l’immobilisme :

« Les gens se déplacent lentement. On a l’impression d’un recueillement, d’une immobilité » (agent)

« Parfois,  on dirait qu’ils sont passés chez Moon ! » (agent)

« Ils devraient manger des Mars pour se donner du tonus ! »(agent) .

 

 

C. L’image de l’unité de travail de chaque participant

 

Les évocations projectives au sujet de l’unité de travail de chacun sont très éclatées, mais nous pouvons repérer quelques idées force :

– Au sein  des unités, nous retrouvons l’idée du manque d’éclat malgré des tentatives d’animation, impression déjà exprimée à propos du Siège :

« C’est gris, froid, austère. Mais en arrivant, on voit un pan de mur rouge, des tâches de couleur. Mais sur le béton, ce n’est pas beau. On sent qu’on a voulu mettre de la couleur, mais il n’y a pas d’éclat » (agent).

– Nous retrouvons également l’idée de cloisonnement dans l’image de la « confrérie de francs-maçons ».

– Enfin, s’exprime aussi la sensation que l’Université René Descartes est composée d’unités très disparates. Ainsi, il y a des lieux dans lesquels les personnes imaginaires mangent des hamburgers, des pâtes, des sandwichs et des pommes de terre en buvant du Coca ou de l’eau d’Evian, et d’autres endroits dans lesquels elles mangent du caviar et du saumon en buvant du champagne.

 

Cette variété des images est probablement à rapprocher de la diversité des réalités propres à chaque unité. En effet, les impressions des personnels Atos-Ita à propos de l’ambiance concrète de leurs conditions de travail sont extrêmement variables selon les situations propres à chaque individu. Trois spécifications de climat peuvent être repérées :

 

– Une ambiance marquée par le caractère agréable et sympathique des relations interpersonnelles, et le sentiment que le travail de chacun est reconnu :

« Nous, on fait beaucoup de pots, tout est prétexte aux pots. On bricole des trucs, c’est convivial et c’est assez ouvert. S’il y a un étudiant qui passe, on l’invite. On n’est pas dans une unité importante, donc on a un réflexe de petit noyau » (agent).

« Je suis OAF (ouvrier accueil entretien), et je fais de tout. Mais on n’a jamais l’impression d’être la dernière roue du carrosse. On a un conseil de gestion et chacun est représenté, par collège »(agent).

 

– Une ambiance marquée à l’inverse par un mauvais climat, et le sentiment de non considération des personnels :

« Chez moi, le personnel scientifique intéresse plus que le technique. Les scientifiques ont un peu plus la faveur et l’intérêt du patron que le technique » (agent).

« Ca fonctionne quand même, mais toujours dans la mauvaise humeur. On se demande dans notre coin à quoi on sert » (agent).

« Ils sont plutôt obnubilés par les questions scientifiques, et tout ce qui concerne l’enseignement. Ils sont plus sensibles à l’image de marque de la fac qu’aux problèmes internes. Par exemple ils ont fait la signalisation et l’enseigne de l’université. Mais la formation du personnel, les conditions de travail, tout ça c’est dans les oubliettes » (agent).

 

– Une ambiance marquée par le stress et le désordre :

« (à propos de travaux d’entretien) On bricole, il faut que ça marche même si ça ne tient qu’une semaine. On travaille dans n’importe quel sens, et on fait toujours  du boulot deux ou trois fois » (agent).

« Il faut être disponible partout, c’est un rythme d’enfer. On est toujours en retard, quelquefois au bord du stress, surtout quand on est au secrétariat, en bout de chaîne » (agent).

« Les décisions sont prises sans être arrêtées, et changent le lendemain » (agent).

 

 

II. L’UNIVERSITE, UNE ENTITE PATCHWORK

 

 

A. Une entité très cloisonnée

 

L’étude des relations existantes entre les UFR fait, dans une certaine mesure, échos aux images et opinions exprimées à propos de l’Université dans son ensemble. L’idée d’une université « éclatée » corrobore le constat global d’absence de relation entre UFR

 

 

1. Des relations de collaboration rarissimes :

 

L’Université René Descartes apparait comme une université extrêmement cloisonnée : très peu de liens de coopération (voire aucun) semblent exister entre les UFR

« La pluridisciplinarité est nulle : c’est plus des unités accolées. » (resp. adm. UFR)

« Les relations avec les autres UFR, c’est très secondaire. » (dir. UFR)

« Chacun est dans sa filière. (…) On a mis côte à côte les anciennes facultés et on a dit, ça va faire l’Université ! » (resp. adm. UFR)

« l’Université, c’est une mosaïque de choses juxtaposées. » (dir. UFR)

Ce constat est connoté différemment en fonction des interviewés. Certains regrettent ce cloisonnement, d’autres ne voient pas l’utilité d’une plus grande coopération. Ces derniers sont nettement plus sensibles aux contraintes formelles qui jouent au détriment de la coopération inter-UFR

« La pluridisciplinarité, c’est un des points faibles de notre Université. On est une université pluridisciplinaire, c’est une chance mais on ne s’en sert pas; on ne fait pas de chose ensemble. » (dir. UFR)

« La pluridisciplinarité, je n’y crois qu’à demi surtout quand on voit ce que c’est une université française, la façon dont c’est structuré. » (dir. UFR)

« La pluridisciplinarité, c’est un faux problème ! C’est une perversion de l’esprit. Si on n’est pas content, on s’en va, surtout dans une université aussi fédérale. » (dir. UFR)

« C’est toujours difficile de mettre en place des formations. Ca pose problème car il n’y a pas toujours de complémentarité. » (dir. UFR)

« La pluridisciplinarité, c’est notre problème à Paris V. Il n’y a pas de communication et, pour l’instant, c’est inutile. Un étudiant de médecine ne peut aller en droit ou aller de psycho vers la psychiatrie; nous, nous ne sommes pas un campus et nous ne correspondons pas à une conception de l’Université. On est sur des voies parallèles et on ne se rencontre jamais (…) La pluridisciplinarité, ça ne veut rien dire 24 ans après mai 68 ! » (resp. adm. UFR)

Par ailleurs, le manque d’intérêt de certaines UFR pour une plus grande coopération peut être appréhendé comme un désintérêt tout relatif : trop occupées à gérer le quotidien, l’existant, la pluridisciplinarité ne leur apparait pas comme un objectif prioritaire, ni même vital :

« La pluridisciplinarité, nous, on n’en souffre pas ! » (resp. adm. UFR)

 

Certaines UFR ont peut être aussi plus à attendre de cette coopération que d’autres : des considérations extérieures aux questions purement intellectuelles se posent.

 

 

2. Des relations qui débouchent sur des situations concurrentielles

 

La situation de pénurie relative dans laquelle vivent les UFR peut mettre à mal les désirs de coopération qui se heurtent ainsi à des difficultés d’ordre matériel telles que, par exemple, des problèmes de postes d’enseignants :

« Nous avons peu de relations avec d’autres UFR Ca pourrait être nécessaire, mais très vite, un problème de postes se pose. Si une UFR apporte une spécialisation dans une autre UFR et que l’UFR qui accueille ne veut pas perdre des postes qu’elle a : ça pose problème. Il faut défendre le capital de l’UFR et ne pas donner sans rien recevoir. » (dir. UFR)

 

Par ailleurs, la concurrence qui existe entre certaines UFR ne favorise pas l’établissement de relations transversales. D’une part, les UFR de même type, les facultés de médecine essentiellement, ne semblent pas réellement souhaiter développer ce type de relation dans l’état actuel de fonctionnement de l’Université. Des « effets pervers » dissuadent en quelque sorte toute volonté de coopération :

« Il y a compétition entre UFR Si une UFR est plus en avance du point de vue scientifique, elle a plus de chance d’avoir des primes de budget et, même si c’est normal, d’autres UFR peuvent se sentir mal, être jalouses. Et puis, il y a le problème de la renommée de faculté qui va gêner les autres facultés. Il y a concurrence : une faculté a essayé de débaucher une grande équipe de recherche d’une autre faculté, au sein même de Paris V. »  (dir. UFR)

D’autre part, la concurrence en terme de renommée scientifique met en fait en compétition toutes les UFR abritant des unités de recherche. Il semblerait que les modes mêmes de financement de la recherche soient actuellement une force d’inertie en matière de coopération interdisciplinaire.

 

Cependant, tous les schémas de coopération ne sont pas nécessairement confrontés à ce type de contraintes. Lorsque ces questions ne se posent pas et qu’une volonté effective de coopération existe, une autre difficulté doit être résolue : un intérêt parfois unilatéral dans certains projets de collaboration. Le partenaire est en fait comme un strict prestataire de service et n’est pas associé à une réflexion, à une démarche pédagogique d’ensemble :

« Ce serait intéressant de mieux former nos étudiants en anglais. Le problème, c’est que les enseignants d’anglais ne sont pas forcément intéressés par un enseignement auprès d’étudiants de niveau bac, pas portés sur l’aspect littéraire, qu’il faut former avec peu d’heures de cours. » (dir. UFR)

« Etre une UFR de service, ça ne satisfait pas tous les enseignants. » (dir. UFR)

 

 

3. Des collaborations très ponctuelles basées sur des contacts personnels

 

Quelques rares relations existent cependant entre UFR Elles sont, semble-t-il, le fruit de rencontres, de relations, d’affinités personnelles, et non l’aboutissement d’une volonté institutionnelle. Cela peut, peut être, expliquer le fait que les interviewés citent à ce sujet aussi bien des relations internes à leur université que des relations avec des UFR d’autres disciplines mais d’universités différentes (celles-ci apparaissant souvent comme plus facile à gérer).

« Nous avons des échanges avec d’autres UFR, les sciences de l’éducation, la sociologie, car je connais personnellement des enseignants. » (dir. UFR)

 

Ce constat permet de mettre en perspective une attente assez générale en direction du développement de contacts personnalisés au sein de l’Université : la connaissance inter-personnelle permettrait de susciter plus de désir de collaboration, plus d’efforts de réflexion dans ce sens qui pourraient aboutir à une plus grande coopération entre UFR :

« Il y a les hommes entre eux. Si on s’apprécie, si on a l’impression d’aller dans le même sens, les gens s’entendent pour faire des concessions, et, là, ça irait mieux. » (dir. UFR)

« Si ils (les médecins) veulent de la pluridisciplinarité, nous, on leur donne ça et pour pas cher ! Mais la pluridisciplinarité, ça ne se décrète pas; il faut être motivé donc il faut se connaître et vivre ensemble. Ici, on ne se connait pas. » (dir. UFR)

 

 

B. Le choix d’une appellation, un choix qui n’est pas neutre

 

1. Une absence d’unité globale qui privilégie l’identification à l’unité de travail

 

Alors que toutes les personnes repèrent parfaitement et de façon identique le Siège, les appellations du lieu de travail varient. Ces variations traduisent l’absence d’une homogénéité en terme de sentiment d’appartenance.

Cette diversité est en partie suscitée par la diversité des situations auxquelles sont confrontées les individus : disparités des conditions de travail, de l’emplacement des locaux, des contraintes objectives telles que les budgets, les effectifs, les taux d’encadrement indispensable par discipline ou encore les degrés d’autonomie respectifs des UFR Elle est par ailleurs confortée par l’absence de relations entre UFR

L’identification se fait alors en fonction d’un sentiment d’appartenance qui varie considérablement. On repère ainsi plusieurs types d’appellation utilisées par les individus :

 

celles reprenant le nom de l’unité dont la personne fait partie : »le labo de psycho », « l’IUT », « la fac de pharma », « la faculté de Necker ». L’unité de travail n’est donc pas forcément l’UFR dans son ensemble, mais peut être une cellule plus petite au sein de l’UFR :

« Les enseignants savent qu’ils sont de Paris V; mais chez les Atos, les plus anciens disent encore ‘je vais à la médecine’ quand ils vont au Siège. (…) Les personnels de labo, ils sont au service du professeur X ou Y. Ils ne se considèrent pas au service de l’Etat mais au service d’un professeur. » (resp. adm. UFR)

 

celles reprenant le nom du lieu où se situe leur unité de travail : « Malakoff », « Montrouge », « la Sorbonne », « l’Odéon », « rue de l’école de médecine »

 

– et des dénominations moins précises : « la fac », « Paris V », « le Siège », « l’Université » qu’il faudrait pouvoir analyser plus en profondeur pour saisir la réalité à laquelle elles font réellement référence.

 

De même, les responsables des UFR semblent plus s’identifier à leur unité immédiate de travail qu’à une identité plus large lièe à l’Université dans son ensemble :

« On est UFR : c’est un terme juridique, mais c’est la fac Cochin-Port-Royal ici ! » (resp. adm. UFR)

« Les gens ne savent pas que c’est Paris V ou René Descartes; ici, René Descartes ça ne parle pas ! On parle de la faculté d’odontologie de Paris ! » (resp. adm. UFR)

Ce sentiment d’appartenance dépend fortement non seulement de la perception qu’ont les individus de l’Université mais aussi de la pratique qu’ils en ont; l’utilisation d’une appellation est notamment conditionnée par les référents auxquels les individus ont accès : en dehors des lieux qu’ils connaissent, l’Université ne constitue pas vraiment une réalité objective, palpable :

« Nous, on sait qu’on appartient à René Descartes. Ici, je suis sur que les étudiants ne me connaissent pas alors l’Université encore moins; et le Président, …! Tout ça, c’est comme Dieu ou l’Europe !! » (dir. UFR)

« Paris V, ça ne veut rien dire ! » (resp. adm. UFR)

 

 

2. Des opinions au sujet du Siège qui reflètent la diversité des situations 

 

A la question « si le Siège n’existait pas, …? », une variété de réponses ont été recueillies. Ces opinions peuvent être rapprochées de l’analyse du fonctionnement de l’Université dans son ensemble :

« peut être que le labo pourrait tourner seul ! » (agent)

« ce serait embêtant car on dépend beaucoup du Siège. » (agent)

« il faudrait que la fac soit plus autonome. » (agent)

« Moi je n’ai pas besoin du Siège; à la limite, ce n’est qu’un niveau en plus ! » (agent)

« pour la vie quotidienne, le Siège n’est pas nécessaire; mais il faudrait que la fac soit autonome pour la gestion de nos carrières. » (agent)

« le Siège, ils nous coûtent du temps ! C’est une pesanteur » (resp. adm. UFR)

« Ca faciliterait tout pour nous ! On est géré par le Ministère et l’Université ne sert d’intermédiaire. Elle alourdit ! » (resp. adm. UFR)

« Si le Siège n’existait pas, (…) je n’ai plus qu’à fermer boutique ! » (resp. adm. Siège)

 

 

3. L‘utilisation d’une appellation, un choix stratégique

 

Le recours à cette identité commune exprimée à travers l’appellation « René Descartes » ou « Paris V » doit, dans une certaine mesure, être appréhendé comme l’aboutissement d’une logique rationnelle reconstituable. En effet, certaines UFR, de par leur histoire, leur positionnement au sein de leur discipline dans son ensemble (au niveau parisien, national, voire international pour celles qui abritent de forts pôles de recherche) préfèrent privilégier leur identité propre plutôt que d’adopter une appellation plus globalisante.

L’utilisation d’un nom plutôt qu’un autre est bien sûr loin d’être un choix neutre : parler de soi, se faire identifier d’une façon spécifique, c’est aussi s’efforcer d’optimiser les retombées éventuelles de cette communication. Promouvoir une image, une identité, bien distincte de celle de l’Université dans son ensemble, se comprend d’autant mieux que l’on a à l’esprit la relative pénurie de moyens des différentes UFR, leur souci de générer des ressources propres et de ce fait leur situation potentielle de concurrence.

« Ce n’est pas parce que vous allez vous appeler René Descartes que vous allez améliorer votre image de marque. L’image de marque se gère avec des moyens ! » (resp. adm. UFR)

De ce fait, en fonction des objectifs, des préoccupations des uns et des autres, le choix d’une appellation se portera soit sur un terme générique, soit sur le nom de l’UFR. Ainsi, la distinction faite par certains interviewés entre les UFR médicales et le reste de l’Université peut se comprendre non pas en terme de mauvaise volonté des uns ou des autres, mais comme étant le fruit de logiques différentes : utiliser une appellation plutôt qu’une autre s’intègre dans des stratégies différentes, stratégies elles-mêmes déterminées par des atouts au départ différents et des contraintes elles-aussi spécifiques.

« René Descartes serait un terme viable s’il n’y avait qu’une seule faculté de médecine. » (dir. UFR)

Tout un ensemble de remarques relatives à l’utilisation d’une appellation plutôt qu’une autre peuvent ainsi être rapprochées car elles relèvent du même type de réflexion : une réflexion en terme d’opportunité et d’intérêt.

« Du point de vue international, on a intérêt à avoir ‘Paris’ dans notre dénomination; on a demandé au Ministère d’avoir ‘Université René Descartes-Paris V’. » (resp. adm. Siège)

« Les médecins, l’étiquette de leur Université, ils n’en ont pas besoin ! » (resp. adm. Siège)

« René Descartes, c’est mieux pour l’étranger. » (resp. adm. UFR)

« Les médecins, ils ne mettent pas René Descartes sur leur plaque de cabinet; pourquoi l’utiliseraient-ils ! » (dir. UFR)

« René Descartes, c’est l’auréole scientifique pour la recherche ! C’est quand même un plus pour ma fac ! » (agent)

 

Par ailleurs, des contraintes liées à l’usage et à une longue utilisation d’une appellation peuvent s’opposer à la modification du nom désignant l’Université :

« Le Ministère ne connait pas René Descartes donc pour les questions de personnel, on dit Paris V. » (resp. adm. Siège)

« René Descartes, c’est bien, mais l’appellation officielle c’est quand même le chiffre. » (resp. adm. UFR)

« C’est l’usage ici, à l’intérieur de l’Université on dit ‘René Descartes’, à l’extérieur on dit ‘Paris V’. » (resp. adm. Siège)

 

 

4. Images spontanées autour des appellations « Paris V » et « René Descartes »

 

Quelques données concernant les images qu’évoquent spontanément les appellations Paris V et René Descartes ont pu être recueillies au cours de cette pré-enquête.

« René Descartes » évoque dans un premier temps le prestige et la renommée :

« On essaie de se mettre à René Descartes, on personnalise et c’est mieux de se référer à quelqu’un d’illustre ! » (resp. adm. UFR)

« René Descartes, c’est plus prestigieux car ‘Paris V’, c’est bête. » (resp. adm. UFR)

C’est par ailleurs une dénomination associée à la scientificité :

« C’est un nom qui convient bien à une discipline scientifique. » (resp. adm. UFR)

L’appellation « Paris V » évoque des associations plus négatives :

« Les numéros ne sont pas agréables » (resp. adm. Siège)

« Paris V, c’est assez vulgaire mais c’est commode ! » (resp… adm…. UFR).

« Sachant que Paris V est dans le 6ème arrondissement, ça pose des problèmes de libellé. » (resp. adm. Siège)

« Les prisonniers, on dit leur numéro de matricule; c’est une façon de décérébrer. » (dir. UFR)

 

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE V

 

 

 

LES SOUHAITS EN MATIERE

 

DE COMMUNICATION

 

 

 

 

La perception des frontières entre communication interne et communication externe est parfois floue, et varie selon les personnes. Nous adoptons dans l’exposé la catégorisation qui a nous a semblé la plus partagée, à savoir que nous parlons de communication interne pour les échanges entre les personnels administratifs, techniques, d’enseignement et de recherche, et de communication externe pour les échanges vers les étudiants d’une part, et vers l’environnement extérieur d’autre part, grand public, universitaire ou professionnel.

 

 

 

I. LA COMMUNICATION INTERNE

 

 

Le premier constat que nous pouvons faire au sujet des souhaits des interviewés en matière de communication interne est que beaucoup d’entre eux sont d’un ordre très général, et sont énoncés presque comme des « voeux pieux ».

Ainsi pour améliorer le fonctionnement général de l’Université René Descartes et de ses unités, il faudrait davantage de moyens financiers et humains :

« Il faudrait résoudre le problème du manque de disponibilités des personnels du Siège, qui sont trop souvent à temps partiel » (dir. UFR).

« Il faudrait avoir des personnes compétentes dans les UFR » (resp. adm. UFR).

 

Mais ce constat ne doit pas nous étonner, vu l’état de pénurie qui règne dans certains services. Plusieurs personnes expriment ainsi leur sentiment qu’aucune situation ne pourra être débloquée si les ressources (financières ou humaines selon les cas) n’augmentent pas, opinion qui semble cohérence avec les situations qu’elles nous décrivent. (A titre d’indication, l’évaluation du seul bugdet des travaux de rénovation urgents à entreprendre pour l’ensemble de l’Université est estimée à 50 millions de francs). Pour ces UFR, la communication interne n’apparait donc pas prioritaire, comme l’exprime un responsable administratif :

« Le problème essentiel est un problème de moyens. On a déjà du mal à faire face à l’urgence (…). Je sais que le Siège n’aime pas ce genre de discours, vous passez pour un bon chef de service si vous gerez avec ce que vous avez (…). Mais ça n’a pas de sens de parler de communication quand il y a des problèmes de moyens vitaux. Ce n’est pas avec de la communication que je peux fonctionner » (resp. adm. UFR).

 

Dans le même ordre d’idées, nous pouvons noter que certains responsables d’UFR ressentent comme provocateur le fait que la direction de l’Université souhaite améliorer la communication interne et externe. Ils n’apprécient pas que le Siège y consacre des moyens financiers dont ils pensent qu’ils leur font cruellement défaut pour des objectifs qu’ils estiment prioritaires. Il semble nécessaire que cette perception soit prise en compte dans la réflexion de la direction de l’Université sur ses objectifs en terme de communication interne et externe. Il semble important notamment de réfléchir sur la façon dont le Siège présentera ses souhaits et ses décisions en ce domaine: pour que les unités adhérent à la démarche du Siège, elles doivent avoir la possibilité de la comprendre et de se sentir concernées.

 

Sur un plan concret, les souhaits des personnes rencontrées en matière de communication interne sont variés. Les données de la pré-enquête ne permettent pas aujourd’hui de juger de la pertinence des propositions. Nous nous contenterons donc de les exposer, en considérant que chacune représente une « piste » potentielle à approfondir dans une étude future.

 

Les souhaits énoncés peuvent être regroupés autour de sept grands thèmes :

 

A. Améliorer la circulation de l’information

 

« Demander franchement à l’Université d’envoyer des documents à toutes les personnes concernées » (dir. UFR).

– Avoir un « échéancier raisonnable » (dir. UFR).

– Adresser des envois individualisés aux ATOS et ITA (resp. adm. Siège).

–  Créer un réseau informatique pour relier l’Université (resp. adm. Siège).

– Avoir « un local ou un numéro de téléphone pour renseigner le personnel sur la formation » (resp. adm. Siège).

– Avoir une plus grande délégation de signature (resp. adm. Siège).

Et enfin, d’une manière plus radicale, de la part des UFR :

« Courcircuiter le Siège, le faire disparaître » (resp. adm. UFR).

 

B. Organiser davantage de réunions pour résoudre les problèmes concrets de vive voix

 

– Les réunions devraient être en petit nombre, pour traiter vraiment les problèmes et ne pas rester dans la généralité ou uniquement « recevoir des informations » (resp. adm. UFR).

– Il devrait y avoir « des réunions régulières avec une rubrique ouverte en dehors de l’ordre du jour » (resp. adm. Siège).

« Le Président devrait réunir les directeurs d’UFR » (resp. adm. Siège).

« Il devrait y avoir un conseil pédagogique à l’Université » (resp. adm. Siège).

 

Pour les responsables, les réunions sont l’occasion de se connaitre, et « si on s’apprécie, on a l’impression d’aller dans le même sens ; les gens s’entendent pour faire des concessions et ça va mieux ». Les réunions de travail, « ça crée des liens et c’est mieux ». Remarquons toutefois que la contrainte liée aux réunions qu’est le temps nécessaire n’est pas prise en compte dans ces déclarations…Rappelons aussi que les réunions ont des objectifs informels qui sont souvent plus stratégiques que ceux affichés.

 

C. Favoriser la rencontre des personnes

 

– Rencontrer ses collègues une ou deux fois dans l’année, et « ne pas hésiter à se déplacer » pour cela  (resp. adm. UFR).

– Faire que les gens du Siège viennent dans les facs et recontrent les gens avec lesquels ils travaillent (dir. UFR).

– Organiser une fête, un « bal de l’université » (dir. UFR).

« On pourrait faire une nuit de Paris V, les gens se recontreraient » (dir. UFR).

– L’Université pourrait organiser « des grandes conférences sur des problèmes actuels, ou sur des thèmes de la vie culturelle. On pourrait faire venir des spécialistes qui animeraient une journée d’études ». On pourrait aussi organiser des conférences autour de la vie scientifique. « On a des sommités ici, il faudrait en profiter. Les professeurs vont faire des conférences ailleurs, pourquoi pas à Paris V » (dir. UFR).

« Faire quelque chose pour que les personnels du Siège et des UFR se connaissent » (resp. adm. Siège).

 

Pour les responsables, les rencontres personnelles devraient être l’occasion de créer des liens et de lever l’anonymat, ce qui facilite ensuite les contacts téléphoniques par exemple et aide à la résolution des problèmes.

 

D. Faciliter le repérage des interlocuteurs

 

« Avoir un annuaire qui soit mis à jour rapidement » (resp. adm. Siège).

« Créer une sorte de bottin, un annuaire général de toute l’université » (resp. adm. Siège).

« Avoir des badges pour identifier le personnel » (resp. adm. Siège).

 

E. Créer des supports de communication interne

 

« Il faudrait un bulletin qui tienne compte de la vie de l’établissement (…). Il y aurait des informations sur le personnel, sur les collègues, et des articles de fond touchant l’enseignement supérieur (…). Mais ce qu’il manque surtout, c’est de communication à l’intérieur de l’UFR : il faudrait un bulletin qui parle de l’UFR : colloques, séminaires, thèses, congés, dates de réunion des commissions, heures de fermeture des services, cafétéria, etc… .Il n’y a pas le minimum ». (resp. adm. UFR).

« Les moyens de communication que l’on pourrait mettre en place ? Il y en a plusieurs, par exemple :

– des lettres du Président à l’ensemble du personnel

– des informations sur ce qui se passe au niveau de la recherche

– une large diffusion du projet quadriennal

– une large diffusion des rapports de recherche » (dir. UFR).

 

Dans l’esprit des interviewés, l’ensemble de ces supports devraient, en favorisant la connaissance des diverses composantes de l’Université, engendrer un sentiment d’appartenance et faciliter une identification de l’ensemble des membres de l’Université à une entité commune.

 

F. Réorganiser l’affectation du personnel et créer des postes « spécialisés »

 

– Avoir du personnel compétent dans les UFR et un minimum de services communs (dir. UFR).

– Ne pas recruter plus de personnel au Siège, mais « étoffer les services des facs » (dir. UFR).

– Avoir des spécialistes pour faire un journal interne (resp. adm. Siège).

– Créer un service juridique centralisé plus étoffé (resp. adm. UFR).

– Recruter un ingénieur pour suivre les travaux de l’université au lieu de soustraiter à des bureaux d’étude extérieurs, ce qui revient très cher (resp. adm. UFR).

« Il y a bien un service des marchés au Siège, on nous a donné un tas de papier, mais c’est tout. J’attends qu’on me donne des conseils un peu techniques » (resp. adm. UFR).

– Avoir au Siège « un ingénieur informatique disponible pour toutes les UFR » (dir. UFR).

– Nécessité d’un ingénieur de maintenance (dir. UFR).

 

L’idée globale qui traverse l’ensemble de ces demandes et qu’il semble important de retenir est la notion de « service ». En effet, tout ce passe comme si le Siège n’apparaissait aujourd’hui que comme demandeur, voire « empêcheur de tourner en rond ». D’un côté le Siège initie des procédures dont les UFR ne voient pas toujours l’utilité, et par ailleurs les UFR le percoivent comme incapable de répondre à leurs besoins. Or il serait souhaitable, pour qu’une coopération s’instaure, que le Siège fonctionne comme un « prestataire de services » pour ses unités, et non l’inverse.

 

G. Revoir la structure de l’Université René Descartes à partir de l’organisation pédagogique

Selon certains responsables du Siège, la communication interne doit tenir compte de la réalité, et aujourd’hui la réalité est celle d’une disparité :

« Il faudrait revoir les structures qui pensent les diplômes et les effectifs de chaque filère » (resp. adm. Siège).

« Ca ne sert à rien d’informer sur les autres facs. Ca ne sert à rien car chacun est dans sa filière, c’est trop cloisonné » (resp. adm. Siège).

Ce constat est confirmé par les déclarations de certains directeurs d’UFR :

« La communication, c’est bien, mais il vaudrait mieux réunir les facs de médecine. A Paris, on a un éclatement en onze facs de mécedin, on pourrait en avoir deux ou trois » (dir. UFR).

« Paris V gagnerait d’une réelle association entre les trois facs de médecine. Les petites UFR pourraient être regroupées dans les grosses sans qu’on les supprime » (dir. UFR).

 

 

II. LA COMMUNICATION EXTERNE

 

 

L’étude de la communication externe ne faisait pas l’objet de notre enquête. Néanmoins, nous avons évoqué ce thème avec quelques responsables de l’Université, et il nous parait intéressant d’exposer dès à présent leurs opinions. Ces éléments, constats et souhaits, ont l’intérêt de fournir des bases pour penser les grandes lignes d’une future étude sur la communication externe.

 

Les opinions relatives à la communication interne de l’Université René Descartes s’articulent autour de trois de ses objectifs :

– le développement de relations et d’accords internationaux

– la promotion de l’Université à l’extérieur

– l’amélioration de la communication avec les étudiants.

 

 

A. Le développement de relations et d’accords internationaux

 

Favoriser les échanges internationaux est un souhait clairement affirmé de la direction de l’Université. Un service de « relations internationales » a été créé au Siège dans le but de concevoir une sorte de banque de données des échanges à l’étranger, destinée à rassembler les actions de l’ensemble des UFR dans le but de les valoriser. Pour cela, le service reçoit de la division du personnel le double de tous les ordres de mission, sur la base desquels il demande aux enseignants-chercheurs de lui adresser un rapport de mission. Mais cet objectif est difficile à atteindre :

« Certains professeurs sont scandalisés qu’on demande un rapport, ils estiment qu’ils n’ont pas de comptes à rendre » (resp. adm. Siège).

 

Cette difficulté est un nouvel effet de la confrontation d’intérêts contradictoires entre le Siège et ses unités, confrontation plusieurs fois constatée. Nous avons en effet souligné la logique et la cohérence des opinions des UFR, qui les amènent à privilégier leur identité propre et conjointement leurs ressources propres.

La même concurrence s’établit pour les relations avec l’extérieur, puisque certaines unités tirent davantage d’intérêts, en terme de renommée et en terme financiers, à gérer elles-mêmes leurs contrats avec l’extérieur. La formalisation des conventions et une gestion centralisée au sein du Siège ne leur apportent aucun bénéfice.

« Le service de relations internationales n’est pas très bien structuré. Nous, on a beaucoup de relations avec l’étranger ; c’est informel, individuel, et on n’a pas de convention. C’est de professeur à professeur, et ce n’est pas formel » (resp. adm. UFR).

« Je reçois beaucoup d’informations du service de relations extérieures, qui viennent du Ministère. Je n’en fais rien. J’affiche, mais je ne diffuse pas car les documents ne contiennent pas d’informations, que des choses vagues, et je sais que nos professeurs ont leurs réseaux. (…) On n’a pas d’intérêt à formaliser des liens par des conventions ni à avoir un service au Siège pour ça. Ce service, c’est une boîte aux lettres » (resp. adm. UFR).

 

Certaines UFR peuvent toutefois tirer plus de bénéfices que d’autres d’un rassemblement de toutes les actions d’échanges extérieurs, en terme d’image. C’est le cas des unités qui n’ont pas, en tant que telles, une renommée suffisante pour qu’elle soit concurrentielle avec celle de l’Université René Descartes. Mais dans tous les cas, les contacts interpersonnels basés sur des réseaux informels restent primordiaux dans l’établissement des relations extérieures. Les membres du Siège sont d’ailleurs tout à fait conscients de ces pratiques :

« Les relations internationales se créent d’abord de personne à personne, d’enseignant à enseignant » (resp. adm. Siège).

Le succès de ce que le Siège appelle « les actions du Président » témoigne également du caractère prépondérant des relations personnelles dans la mise en place d’actions internationales réussies :

« (A propos du parrainnage de l’Institut médical de Bucarest, qui a consisté en un envoi de livres payés par l’Université René Descartes et par l’organisation de deux colloques franco-roumains): Ca n’a été possible que parce que l’enseignant a tout managé à partir de son propre réseau. C’est un bon boulot, parce qu’il y a un prof qui s’est investi (…). C’est toujours un réseau de personnes. Ce sont des enseignants qui sont sollicités hors de l’Université et qui ensuite ont ratttachés leurs contacts à l’Université » (resp. adm. Siège).

 

 

B La promotion de l’Université à l’extérieur

 

La concurrence entre Siège et unités et l’importance des réseaux personnels n’empêchent pas que certains UFR souhaitent que l’Université René Descartes mette en place des moyens de communication externe, sous forme de supports et d’actions.

 

En matière de supports, des responsables déplorent l’absence d’une plaquette de présentation de l’ensemble de l’Université René Descartes, rédigée en anglais pour être utilisable à l’étranger :

« Le problème du livret de l’étudiant, c’est qu’il n’y a rien d’exploitable, ni au niveau national, ni au niveau international. J’ai été récemment à Oman pour représenter l’Université René Descartes, et je n’avais rien d’autre à leur laisser que le livret de l’étudiant. Ce n’est même pas en anglais et les filières ne sont pas clairement présentées (c’est à la fois trop vague et trop précis) » (dir. UFR).

Les services du Siège sont conscients de ce déficit en support :

« Le service des relations extérieures a pour mission de faire une plaquette de prestige, assez largement diffusée, peut-être 10 000 exemplaires, qu’on diffuserait tous azimuts, auprès des autres universités et des entreprises » (resp. adm. Siège).

 

En terme d’actions, certaines personnes expriment le souhait que l’Université René Descartes fasse des efforts pour se faire connaître et mettre en oeuvre une réelle « politique marketing ».

« On a l’impression qu’à Orsay ils ont un vrai marketing (on en entend parler, dans les commissions d’expert, un peu partout ..). Il doit y avoir un service qui se charge de la promotion d’Orsay (…). Il faudrait un service qui fasse la promotion, un service de professionnels » (dir. UFR).

Quelques interviewés regrettent que les réussites des différentes unités ne soient pas valorisées dans une communication externe.

« On a une attachée de presse qui ne fait pas son boulot (…). Par exemple, récemment il y a eu un article dans Le Monde de l’Education sur les Deug rénové, et Paris V n’était même pas cité. Or le Deug rénové de Paris V est le premier classé » (dir. UFR).

« On a des personnes de très bons niveaux : on obtient des réussites, et on n’est pas capable de faire mousser çà » (dir. UFR).

 

 

C. L’amélioration de la communication avec les étudiants

 

Enfin, les souhaits des personnes rencontrées en matière de communication externe portent sur les informations destinées aux étudiants.

Dans ce domaine, ils énoncent un certain nombre de propositions, plus ou moins générales :

– Il faudrait plus d’échanges entre les étudiants et de professeurs (resp. adm. Siège).

– Le personnel du CIDO devrait être plus nombreux (resp. adm. Siège).

– Le guide de l’étudiant doit être diffusé plus largement (resp. adm. Siège).

« On pourrait imaginer un livret de l’enseignant pour qu’il puisse répondre aux étudiants » (resp. adm. Siège).

– On pourrait créer des contacts entre UFR par l’intermédiaire des formations, comme par exemple :

« Améliorer la connaissance de l’anglais chez les étudiants en faisant venir des professeurs d’autres UFR » (dir. UFR).

« Faire intervenir les sciences sociales dans le cursus psychologique des étudiants de médecine » (dir. UFR).

« Faire des cours de communication aux étudiants pour qu’ils sachent communiquer avec leurs clients » (dir. UFR).

En matière de communication destinée aux étudiants, plusieurs personnes citent les journées portes ouvertes, qui ont pour objectif de donner une première information et d’inciter les élèves à s’informer plus. Ce type d’initiative semble réussi et  apprécié.

 

Enfin, plusieurs responsables regrettent que les échanges ERASMUS ne fonctionnent pas très bien, notamment au niveau de l’accueil des étudiants étrangers en France, pour lequel l’Université René Descartes ne prévoit pas de struture adaptée. Certains soulignent par ailleurs que les échanges sont unilatéraux, car les étudiants français ne partent pas.

 

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